La tempête financière actuelle a vite enterré (à côté d’un vieux mammouth) la controverse sur l'école maternelle lancée par une petite phrase de Xavier Darcos. Au delà de la polémique sur les termes employés pour qualifier le rôle des enseignants des écoles maternelles, la question de l'efficacité de la scolarisation précoce des enfants mérite, il est vrai, d'être posée. La petite section de maternelle se substitue en effet à d'autres modes de garde, tous en partie subventionnés par l'Etat, et une analyse de l'efficacité des dépenses de l'Etat dans ce domaine est en effet une vraie question pour les finances publiques. De plus, la remise en question de la maternelle est aussi en partie celle d'un modèle qui favorise la socialisation précoce des enfants et le retour des mères sur le marché du travail. L'analyse de l'efficacité de cette politique de scolarisation doit donc prendre en compte non seulement son coût, mais aussi sa qualité et son effet sur les enfants et leurs parents.
Le coût de la maternelle doit d'abord être comparé aux coûts engendrés par les autres types de mode de garde. Il existe en effet en France une grande diversité des modes de gardes des enfants en bas âge, même si l'accès à certains est fortement rationné : assistante maternelle, garde à domicile, garde partagée, EAJE (établissement d'accueils de jeunes enfants, c'est-à-dire les crèches et structures similaires), ainsi que la garde par un proche ou parent. A cela s'ajoute la possibilité d'une scolarisation précoce des enfants, qui est une particularité du système français. En effet, si l'instruction est obligatoire à partir de 6 ans, les parents peuvent scolariser leur enfant à l'école maternelle à partir de 3 ans, voire 2 ans si l'école veut bien les accueillir. Or, la Cour des Comptes met bien en évidence dans son dernier rapport le faible coût de la maternelle par rapport aux autres modes de gardes auxquels devraient avoir recours les parents s'ils ne pouvaient envoyer leurs bouts de choux à l'école : une année de maternelle coûtait 4570 euros par enfant en 2006 contre 13368 en EAJE, soit près de trois fois plus cher! On peut calculer que les autres modes de gardes sont tous plus coûteux que l'école, d'environ 2 fois plus cher pour une assistante maternelle à près de 5 fois plus pour une garde à domicile. Enfin, le coût de garde des enfants par un de ses parents est lui aussi non négligeable, puisque la politique familiale française subventionne les parents qui s'arrêtent de travailler pour élever leur enfant, jusqu'à un maximum de 530 euros par mois pendant trois ans, sans compter le coût d'opportunité de retirer du marché du travail ces personnes pendant plusieurs années.
Les premières analyses économiques sur les gardes d'enfants s'intéressaient d'ailleurs essentiellement à l'impact de ces dispositifs sur l'offre de travail des femmes. Mesurer l'impact des subventions à la garde d'enfant sur l'offre de travail des femmes est cependant compliqué, car le choix du mode de garde et les décisions de participation des femmes sur le marché du travail ne sont en général pas indépendants. Dans une étude récente, Dominique Goux et Eric Maurin ont utilisé des variations exogènes de l'accès en maternelle pour estimer l'impact sur l'offre de travail des femmes. Plus précisément, ils ont exploité le fait que les possibilités de scolarisation d'un enfant dès deux ans dépendent en France du mois de naissance (il faut avoir au moins deux ans dans l'année d'entrée à l'école) : les enfants nés en décembre d'une année sont donc souvent scolarisés un an avant ceux qui sont nés quelques jours après, en janvier de l'année suivante. En utilisant cette variation de l'accès à l'école maternelle, les deux chercheurs mettent en évidence un effet positif de la scolarisation à deux ans sur la reprise d'activité des femmes seules, en particulier dans les régions où l'accès à d'autres types de mode de garde est limité. En revanche la scolarisation des enfants n'affecte pas l'offre de travail des femmes en couple. L'effet global de la scolarisation en maternelle sur l'offre de travail des femmes reste donc modeste, même s'il est important pour les femmes seules qui ont souvent moins de ressources pour faire garder leur enfant par des proches parents.
Finalement, la question de l'efficacité des modes de garde dépend en grande partie de la qualité du service rendu : a-t-on intérêt à socialiser très tôt les enfants, dans des structures d'accueil collectives? Si de nombreuses activités d'éveil sont proposées a l'école maternelle (en dehors de la sieste…), il n'est pas forcement évident que la vie en collectivité soit bénéfique pour les touts petits.
Les analyses économiques menées sur différents pays ne donnent d'ailleurs pas toutes les mêmes résultats. Si les premières études économiques sur le sujet, qui évaluaient l'impact de programmes expérimentaux en direction d'enfants défavorisés aux Etats-Unis concluaient à un effet positif d'une socialisation précoce, une récente étude sur données canadiennes a contesté l'effet bénéfique des modes de garde collectifs. Michael Baker, Jonathan Gruber et Kevin Milligan ont en effet étudié une politique de généralisation des subventions à la garde d'enfants, qui s'est accompagnée par une extension des structures d'accueil collectives pour les enfants de 0 à 4 ans, mise en place au Québec dans les années 90 mais pas dans les autres provinces canadiennes. Les trois chercheurs mettent en évidence que dans les années qui ont suivi la mise en place de cette politique, les petits québécois ont montré plus de signes d'inattention et d'agressivité que les autres petits canadiens, ainsi qu'une moins bonne santé. Cependant, ces résultats ne permettent pas de tirer un bilan définitif sur les modes de garde collectifs, car les chercheurs n'ont en effet mesuré que les effets à court terme de cette politique, mais pas à long terme. Or il est possible que les premières années de socialisation soient dures à vivre, que ce soit à deux ans ou plus tard. Toute la question est de savoir si socialiser trop tôt a un effet négatif en lui-même. Pour cela, il faut regarder les effets à long terme de la scolarisation précoce. De plus, il faut souligner que les modes de garde développés aux Québec étaient différents de l'école maternelle.
Plusieurs chercheurs se sont penchés sur l'impact à long terme des années passées en maternelle. L'étude de Dominique Goux et Eric Maurin sur données françaises a évalué l'impact de la scolarisation à deux ans sur les performances scolaires ultérieures des enfants. Leur technique d'estimation repose sur le fait que la possibilité de scolariser son enfant à deux ans dépend non seulement du mois de naissance, mais aussi du nombre de places disponibles dans les écoles, qui varie beaucoup de région en région. Le pourcentage d'enfants scolarisés à deux ans est toujours élevé pour ceux qui sont nés au début de l'année, mais il baisse fortement pour les enfants nés pendant l'été dans les régions qui ont peu de places, alors qu'il reste encore élevé dans les autres régions et ne baisse que pour les enfants nés à la fin de l'année. Si la scolarisation à deux ans avait un effet négatif, on devrait donc observer une baisse des performances des enfants nés pendant l'été dans les régions à fort taux de scolarisation précoce par rapport aux autres régions, qui devrait se résorber pour les enfants de la fin de l'année. Or l'analyse ne montre aucune divergence significative des résultats scolaires au primaire ou au collège (mesurés respectivement par les tests en CE2 et par la proportion de redoublants à 15 ans) en fonction des régions. D'autres études, en particulier celles de Samuel Berlinski, Sebastian Galiani, Marco Manacorda et Paul Gertler sur l'Uruguay et l'Argentine trouvent aussi des effets bénéfiques à plus long terme des politiques de scolarisation massive en maternelle. Non seulement les enfants qui ont été scolarisés plus tôt ont de meilleurs résultats aux tests passés à l'école, mais ils ont tendance à plus participer et être plus attentifs en classe.
Finalement, que conclure de ces études? D'abord que l'école maternelle semble faire au moins aussi bien que les autres types de modes de garde pour les petits de 2 et 3 ans : scolariser les enfants à l'école maternelle dès deux ou trois ans ne semble pas nuire à leur développement ultérieur. En revanche, on ne sait finalement pas grand-chose de l'effet des différents modes de gardes pour les bébés (entre 0 et 2 ans), alors que l'effort public en la metière est important et qu'il a été récemment fortement augmenté avec la mise en place de la Prestation d'Accueil du Jeune Enfant (voir le rapport de la Cour des Comptes). Avant de se prononcer sur l'efficacité de l'école maternelle, une étude comparative des différents modes de garde serait bien nécessaire.
Crédit photo : Julie70
Le coût de la maternelle doit d'abord être comparé aux coûts engendrés par les autres types de mode de garde. Il existe en effet en France une grande diversité des modes de gardes des enfants en bas âge, même si l'accès à certains est fortement rationné : assistante maternelle, garde à domicile, garde partagée, EAJE (établissement d'accueils de jeunes enfants, c'est-à-dire les crèches et structures similaires), ainsi que la garde par un proche ou parent. A cela s'ajoute la possibilité d'une scolarisation précoce des enfants, qui est une particularité du système français. En effet, si l'instruction est obligatoire à partir de 6 ans, les parents peuvent scolariser leur enfant à l'école maternelle à partir de 3 ans, voire 2 ans si l'école veut bien les accueillir. Or, la Cour des Comptes met bien en évidence dans son dernier rapport le faible coût de la maternelle par rapport aux autres modes de gardes auxquels devraient avoir recours les parents s'ils ne pouvaient envoyer leurs bouts de choux à l'école : une année de maternelle coûtait 4570 euros par enfant en 2006 contre 13368 en EAJE, soit près de trois fois plus cher! On peut calculer que les autres modes de gardes sont tous plus coûteux que l'école, d'environ 2 fois plus cher pour une assistante maternelle à près de 5 fois plus pour une garde à domicile. Enfin, le coût de garde des enfants par un de ses parents est lui aussi non négligeable, puisque la politique familiale française subventionne les parents qui s'arrêtent de travailler pour élever leur enfant, jusqu'à un maximum de 530 euros par mois pendant trois ans, sans compter le coût d'opportunité de retirer du marché du travail ces personnes pendant plusieurs années.
Les premières analyses économiques sur les gardes d'enfants s'intéressaient d'ailleurs essentiellement à l'impact de ces dispositifs sur l'offre de travail des femmes. Mesurer l'impact des subventions à la garde d'enfant sur l'offre de travail des femmes est cependant compliqué, car le choix du mode de garde et les décisions de participation des femmes sur le marché du travail ne sont en général pas indépendants. Dans une étude récente, Dominique Goux et Eric Maurin ont utilisé des variations exogènes de l'accès en maternelle pour estimer l'impact sur l'offre de travail des femmes. Plus précisément, ils ont exploité le fait que les possibilités de scolarisation d'un enfant dès deux ans dépendent en France du mois de naissance (il faut avoir au moins deux ans dans l'année d'entrée à l'école) : les enfants nés en décembre d'une année sont donc souvent scolarisés un an avant ceux qui sont nés quelques jours après, en janvier de l'année suivante. En utilisant cette variation de l'accès à l'école maternelle, les deux chercheurs mettent en évidence un effet positif de la scolarisation à deux ans sur la reprise d'activité des femmes seules, en particulier dans les régions où l'accès à d'autres types de mode de garde est limité. En revanche la scolarisation des enfants n'affecte pas l'offre de travail des femmes en couple. L'effet global de la scolarisation en maternelle sur l'offre de travail des femmes reste donc modeste, même s'il est important pour les femmes seules qui ont souvent moins de ressources pour faire garder leur enfant par des proches parents.
Finalement, la question de l'efficacité des modes de garde dépend en grande partie de la qualité du service rendu : a-t-on intérêt à socialiser très tôt les enfants, dans des structures d'accueil collectives? Si de nombreuses activités d'éveil sont proposées a l'école maternelle (en dehors de la sieste…), il n'est pas forcement évident que la vie en collectivité soit bénéfique pour les touts petits.
Les analyses économiques menées sur différents pays ne donnent d'ailleurs pas toutes les mêmes résultats. Si les premières études économiques sur le sujet, qui évaluaient l'impact de programmes expérimentaux en direction d'enfants défavorisés aux Etats-Unis concluaient à un effet positif d'une socialisation précoce, une récente étude sur données canadiennes a contesté l'effet bénéfique des modes de garde collectifs. Michael Baker, Jonathan Gruber et Kevin Milligan ont en effet étudié une politique de généralisation des subventions à la garde d'enfants, qui s'est accompagnée par une extension des structures d'accueil collectives pour les enfants de 0 à 4 ans, mise en place au Québec dans les années 90 mais pas dans les autres provinces canadiennes. Les trois chercheurs mettent en évidence que dans les années qui ont suivi la mise en place de cette politique, les petits québécois ont montré plus de signes d'inattention et d'agressivité que les autres petits canadiens, ainsi qu'une moins bonne santé. Cependant, ces résultats ne permettent pas de tirer un bilan définitif sur les modes de garde collectifs, car les chercheurs n'ont en effet mesuré que les effets à court terme de cette politique, mais pas à long terme. Or il est possible que les premières années de socialisation soient dures à vivre, que ce soit à deux ans ou plus tard. Toute la question est de savoir si socialiser trop tôt a un effet négatif en lui-même. Pour cela, il faut regarder les effets à long terme de la scolarisation précoce. De plus, il faut souligner que les modes de garde développés aux Québec étaient différents de l'école maternelle.
Plusieurs chercheurs se sont penchés sur l'impact à long terme des années passées en maternelle. L'étude de Dominique Goux et Eric Maurin sur données françaises a évalué l'impact de la scolarisation à deux ans sur les performances scolaires ultérieures des enfants. Leur technique d'estimation repose sur le fait que la possibilité de scolariser son enfant à deux ans dépend non seulement du mois de naissance, mais aussi du nombre de places disponibles dans les écoles, qui varie beaucoup de région en région. Le pourcentage d'enfants scolarisés à deux ans est toujours élevé pour ceux qui sont nés au début de l'année, mais il baisse fortement pour les enfants nés pendant l'été dans les régions qui ont peu de places, alors qu'il reste encore élevé dans les autres régions et ne baisse que pour les enfants nés à la fin de l'année. Si la scolarisation à deux ans avait un effet négatif, on devrait donc observer une baisse des performances des enfants nés pendant l'été dans les régions à fort taux de scolarisation précoce par rapport aux autres régions, qui devrait se résorber pour les enfants de la fin de l'année. Or l'analyse ne montre aucune divergence significative des résultats scolaires au primaire ou au collège (mesurés respectivement par les tests en CE2 et par la proportion de redoublants à 15 ans) en fonction des régions. D'autres études, en particulier celles de Samuel Berlinski, Sebastian Galiani, Marco Manacorda et Paul Gertler sur l'Uruguay et l'Argentine trouvent aussi des effets bénéfiques à plus long terme des politiques de scolarisation massive en maternelle. Non seulement les enfants qui ont été scolarisés plus tôt ont de meilleurs résultats aux tests passés à l'école, mais ils ont tendance à plus participer et être plus attentifs en classe.
Finalement, que conclure de ces études? D'abord que l'école maternelle semble faire au moins aussi bien que les autres types de modes de garde pour les petits de 2 et 3 ans : scolariser les enfants à l'école maternelle dès deux ou trois ans ne semble pas nuire à leur développement ultérieur. En revanche, on ne sait finalement pas grand-chose de l'effet des différents modes de gardes pour les bébés (entre 0 et 2 ans), alors que l'effort public en la metière est important et qu'il a été récemment fortement augmenté avec la mise en place de la Prestation d'Accueil du Jeune Enfant (voir le rapport de la Cour des Comptes). Avant de se prononcer sur l'efficacité de l'école maternelle, une étude comparative des différents modes de garde serait bien nécessaire.
Crédit photo : Julie70
13 commentaires:
Quelques remarques, en vrac :
- L'école maternelle n'est pas un mode de garde, il n'est donc pas très pertinent de comparer l'école à d'autres modes de garde.
- Une étude portant sur les modes de gardes de 0 à 4 est totalement irréaliste quant au sujet principal, à savoir l'enfant. En effet, les besoins affectifs et de socialisation des enfants varient beaucoup selon l'âge durant cette période. Cette méconnaissance de la réalité psychique de l'enfant de moins de 4 ans ne peut qu'introduire des biais dans les observations. Ainsi, de 0 à 6 mois, le nourrisson a un besoin quasi permanent de la présence de sa mère, mère en tant qu'objet stimulant et rassurant (figure, odeur, voix). L'obligation de placement des enfants chez un tiers inconnu dès 3 mois pour cause de reprise du travail est une aberration du point de vue du développement affectif du nourrisson, séparation précoce et anticipée qui doit avoir plus d'impact sur le développement affectif de l'enfant, quelque soit le mode de garde choisi. Vers 8 mois, le bébé manifeste peur et pleurs face à de nouveaux visages. Cette période n'est pas non plus prise en compte dans nos modes de vie actuel. Ce n'est qu'à partir de 12-18 mois que l'enfant fait montre de comportements exploratoires, surtout s'il à bénéficié de réassurance intra-familiale la première année de sa vie.
Bref, les besoins de l'enfant ne sont jamais pris en compte dans les modes de socialisation et de garde...
Quant à la fréquentation de l'école maternelle, en tant que structure d'apprentissages précoces, elle ne bénéficie pas de la même manière aux enfants qui ont été "socialisés" de force dès 3 mois qu'aux enfants socialisés à la fin de leur période de réassurance. Ceci est également vrai en fonction du milieu d'origine. Pour les enfants de milieux défavorisés, l'école, avec sa vaste gamme de stimuli, est une véritable de chance et un moteur d'égalité devant l'enseignement postérieur. N'oublions pas que dans certaines familles, les enfants ne voient jamais un adulte référent derrière un livre. L'arrivée à l'école est aussi un premier contact avec l'idée de lecture... et cela fait une sacrée différence pour la suite.
Bref, j'arrête de vous polluer... je vais peut-être finir par pondre un billet chez moi.
:-)
Pas d'analyse liée au taux démographique en fonction des systèmes de "mode de garde" proposés pour les enfants ?
Cela me parait un manque important dans un tel article.
Bon, comme j'avais posté ça chez les éconoclastes, je le remets ici…
Ce qui est vrai de la maternelle l'est encore plus dans le secondaire : essayez de faire garder un adolescent mou et sans envie en dehors de l'école…
Plus sérieusement : aucune étude comparant les enfants qui, au même âge sont à l'école ou chez eux ?
Et puis, j'y vois un avantage supplémentaire, qui n'est pas évoqué : c'est le fait que ça doit profiter plus aux élèves/enfants des couches sociales les plus défavorisées, en les sortant de chez eux et en les ouvrant à autre chose ?
Et d'ailleurs, ne peut-on relier ça aux études qui montrent que l'hétérogénéité chez les élèves profite à tous les élèves, les bons comme les mauvais ?
Reste à savoir si la garderie des enfants est bien un service dû par l'Etat.
Je me demande également quelle est exactement la structure des coûts facturés aux parents pour une garde : rien qu'un peut de libéralisation et de concurrence ne sache résoudre, cependant : il est en effet parfaitement inconcevable dans l'absolu que l'état soit "naturellement" capable de faire mieux pour moins cher que ses citoyens sur ce sujet.
Bonjour,
Je tenais d'abord à souligner l'intérêt que suscite cet article.
Il me vient cependant plusieurs questions que je souhaiterai vous soumettre :
1. Vous semblez mettre sur le même plan garde d'enfant et école. Cependant, le principe économique n'est pas le même. L'école est un investissement pour l'avenir et une création de capital humain, la garde d'enfant n'a aucun objectif autre que de soulager des parents qui veulent travailler, sans objectif autre.
2. Dans ce cadre-là, quel serait l'objectif de la collectivité à financer la garde plutôt que de mettre les gamins à l'école ? Si les parents ne veulent pas investir sur leur enfant, doit-on les soutenir dans ce choix ?
3. Quel impact de tout cela sur la démographie ?
En fait, il me semble, sur cette question, qu'il faut sortir de l'aspect purement économique et s'appuyer sur des objectifs sociaux et politiques.
A bientôt,
Rappelons la théorie : l'Etat se substitue au marché lorsqu'on a quelques arguments pour penser que le marché ne fonctionnerait pas.
C'est le cas pour l'éducation. N'en parlons plus.
Ce n'est pas le cas pour le simple gardiennage de mômes. D'ailleurs, dans le cas contraire, pourquoi ne pas exiger la pension complète ?
Une mutualisation des locaux entre école et garderie permettrait certainement un meilleur usage des moyens, surtout en zone rurale, c'est un fait : est-ce pour autant une raison pour faire financer la partie "garderie" par le budget de l'état ? Je ne crois pas.
Si les parents d'élèves préfèrent salarier des instits de maternelle pour faire garder leurs gosses, qu'ils le fassent donc. Mais qu'ils ne demandent pas à l'état de payer pour ça.
@Mathieu L:
"Si les parents ne veulent pas investir sur leur enfant, doit-on les soutenir dans ce choix ?"
Par "investir" tu veux dire "démissionner et accepter une perte de salaire pendant 3 ans sans garantie de retrouver du travail ensuite, dans un contexte ou le coût de la vie est élevé" ?
Donc tu peux changer ton "veut" en "peut", merci (vu que je me sens concerné, ayant un bébé de 2 mois qui va poser un casse-tête à ses 6 mois)
Quand à "rien qu'un peut de libéralisation et de concurrence ne sache résoudre", la personne qui a écrit ça n'a jamais cherché un mode de garde qui coûte moins qu'un smic sur Paris. Qu'est ce que c'est chiant ces densités et vieillissements de populations, ces couts de logements et ces heures de transport qui font rien qu'à embêter nos belles théories sur la libéralisation et la libre concurrence qui règle tout en apportant l'offre de l'assistante maternelle dans le poitou à la demande du couple en banlieue parisienne...
Pourquoi croyez-vous qu'il y ait des emplois vacants et bien payés sur Paris ? S'il était agréable d'y vivre, les actifs insatisfaits de leur sort, et ils sont nombreux, se battraient pour les avoir.
Mais il est vrai que si vous aviez le culot de demander un salaire permettant une vie décente à Paris, vous n'auriez pas le job.
Reste qu'y habiter est votre choix. Il vous en coûte ? Certes, mais autant qu'à nous tous.
@ Coralie : je parlais plutôt des parents qui refusent de mettre leurs gamins à la maternelle à trois ans et les gardent. Je ne crois pas que cette attitude mérite un financement public, car l'école est un investissement.
Merci de m'avoir permis de préciser.
Les objectifs de la scolarisation à l´école maternelle ne sont en effet pas les mêmes que ceux de la garde en crèche ou par une assistante maternelle, mais il se trouve que pour les petits de deux ou trois ans, la question du choix (souvent contraint) de faire garder son enfant ou de le scolariser en maternelle se pose bien. A ce titre, la comparaison de la scolarisation précoce á l´école maternelle et des autres modes gardes peut se justifier.
De plus, les premières années du développement d´un enfant sont cruciales pour l´acquisition de capacités cognitives et non cognitives et l´investissement de l´Etat dans le développement intellectuel des tout petits peut se justifier d´un point de vue économique. L´intervention dès la petite enfance est d´ailleurs un cheval de bataille du prix Nobel James Heckman (voir ici pour un article qui résume l´argumentation), qui considère que l´investissement dans la petite enfance a des effets plus durables sur les capacités cognitives des enfants que les investissements réalisés á l´école primaire ou plus tard. Pour Heckman, l´Etat a intérêt à investir dans le développement cognitif des enfants, en particulier ceux qui sont issus de milieux défavorisés, car les externalités positives pour la société sont énormes, en particulier en termes de réduction de la criminalité. Comme le rappelle justement Monolecte, chaque enfant est unique et il ne s´agit pas forcément de le scolariser dès trois mois, mais des formes d´intervention auprès des tout petits dans les milieux défavorisés pourraient être expérimentées.
Enfin, si les congés parentaux avant et après la naissance des enfants sont très importants, il n´est pas encore prouvé que les politiques qui favorisent un retrait durable du marché du travail d´un des parents afin de s´occuper des enfants bénéficient vraiment au développement de ces derniers.
Très bon article en effet, même s'il compare des systèmes qui n'ont pas le même objectif.
Un système de garderie sera là pour répondre à un besoin des parents (prise en compte de leurs horaires,amplitude sur la journée, la semaine, l'année).
Par contre, l'école a pour mission des apprentissages plus larges que la socialisation et doit donc être obligatoirement plus limitée dans le temps car plus fatigante pour les enfants.
La scolarité des très jeunes (2 ans) n'est possible et bénéfique que si l'école peut trouver un compromis entre les 2 systèmes (liaison crèche-école, classes plus grandes pour permettre la déambulation, plus d'adultes en classe pour éviter les peurs de l'abandon...) mais ça demande un réel investissement ....qui profitera essentiellement aux classes défavorisées dont les enfants ont besoin d'être stimulés, ouverts sur l'extérieur. La seule chance parfois pour eux d'avoir des livres entre les mains, quelqu'un qui lit une histoire, un bain de langage stimulant (français pour les familles étrangères...)
Économiquement parlant: des investissements lourds pour des femmes qui ne sont pas toujours sur le marché de l'emploi + des systèmes de garde à financer qui devront quand même compléter l'amplitude horaire des autres parents. Bref, un choix de société et d'avenir...
Mathieu L a écrit:
"Coralie : je parlais plutôt des parents qui refusent de mettre leurs gamins à la maternelle à trois ans et les gardent. Je ne crois pas que cette attitude mérite un financement public, car l'école est un investissement."
Il me semble que la comparaison effectuée dans l'article portait surtout sur les enfants de moins de 3 ans (pour lesquels la non-scolarisation est rarement un choix des parents, mais plutôt une obligation faute de place...)
Les enfants non-scolarisés après 3 ans en France sont très peu nombreux (les rares cas dont j'aie entendu parler étaient surtout des enfants en zone rurale quelque peu isolée, d'où des contraintes de trajets...)
Et il y a des aides qui existent pour la garde après 3 ans (moins élevées que pour avant 3 ans) parce qu'il y a des besoins de garde périscolaire: nombreux sont les parents qui ne peuvent pas aller chercher leur enfant à 16h30 à l'école...
Au passage, un détail qui me paraît assez injuste est que certaines aides s'arrêtent ou diminuent fortement le jour des 3 ans de l'enfant, alors qu'il y a des enfants qui ne sont scolarisables qu'à 3 ans et plusieurs mois (par ex. dans mon entourage, une petite fille née en mars 2005 vient d'être scolarisée, elle n'a pas pu l'être en septembre 2007 ou janvier 2008 faute de place). La garde coûte toujours aussi cher entre l'anniversaire des 3 ans et la rentrée scolaire (et il y a aussi des crèches qui refusent les enfants après leur 3ème anniversaire...)
@ EE : Oui, en relisant mon commentaire, j'admets que la réflexion était plutôt mal tournée...
Enregistrer un commentaire