C’est bien connu : les Gaulois adorent débattre. Carte scolaire, retraites, niveau de la dette, jurys populaires, Banque centrale, réformes des universités, délocalisations, etc. : il n’est pas un thème qui n’attise des polémiques enflammées dans les journaux et les blogs de Gaule. Et si les sujets économiques y occupent une place de choix, c’est sans doute parce qu’ils cristallisent les passions d’un peuple ô combien belliqueux.
Malheureusement, lorsqu’il parle d’économie, le Gaulois se montre souvent irascible et de mauvaise foi (« Alésia ? connais pas ! »). Il préfère les discours incantatoires et les postures idéologiques à l’analyse sereine des faits et des chiffres. Tantôt déclinologue, tantôt utopiste, il se méfie des statistiques et, plus encore, des économistes, qu’il soupçonne d’être à la solde de l’Empire romain. Ne comprenant guère leur dialecte barbare, qui semble consister en la répétition inlassable de mots déplaisants (« incitations », « efficacité », « évaluation », « coût-bénéfice »), le Gaulois se refuse à les considérer comme les représentants d’une science digne d’intérêt. Et lorsqu’il se demande si l’existence de fortes subventions à la production des menhirs est ou non une bonne chose, il préfèrera toujours s’en remettre à l’avis éclairé du barde Bernarmarix, au prétexte que sa harpe passe mieux à la télé que celles des économistes compétents.
Il faut reconnaître que les chefs Gaulois ne montrent pas vraiment l’exemple : la période électorale, qui les voient briguer les suffrages de leurs compatriotes, tourne invariablement au festival de la mauvaise foi, des chiffres maltraités et des promesses inconsidérées. A les entendre, il n’est pas un problème économique – logement, éducation, emploi, retraites – qui ne puisse être réglé par une bonne rasade de potion magique, délicatement parfumée au déficit public. Mais gare à celui qui oserait mettre son nez dans la recette ! Car il n’est rien qu’un chef gaulois déteste plus que de voir ses politiques publiques évaluées par des économistes indépendants, donc pas assez serviles. C’est pourquoi les chefs gaulois et leurs sbires gardent jalousement le secret de fabrication de la potion qu’ils distribuent si généreusement au bon peuple de Gaule.
Notons également que paresseux et un poil arrogants, les Gaulois et leurs chefs ignorent superbement les réformes économiques menées chez leurs voisins Goths, Bretons ou Helvètes. Pourquoi en effet s’intéresseraient-ils à ce qui se passe au-delà des frontières de la Gaule, puisqu’ils sont, comme chacun sait, les meilleurs dans tous les domaines ? Tout juste ont-t-il entendu parler de la « flexicurité » des Normands, mais sans être véritablement capable d’expliquer de quoi il s’agit exactement. Cette absence de curiosité pour ce qui se passe ailleurs est dommageable à double titre : d’une part, elle prive les Gaulois de précieux enseignements pour mieux comprendre leurs propres politiques publiques et proposer des réformes efficaces ; d’autre part, elle alimente chez eux un discours détestable fait d’autosatisfaction et d’immobilisme.
C’est parce que nous ne nous satisfaisons pas de la manière dont le débat économique fonctionne aujourd’hui en Gaule et que nous avons acquis la conviction que l’économie publique a son mot à dire que nous, jeunes chercheurs en économie, avons décidé de lancer ce blog collectif. Ecopublix a pour ambition de faire parler les faits et les chiffres pour tenter d’éclairer les enjeux de questions aussi diverses que l’éducation, l’emploi, les retraites, le logement, les marchés financiers, le développement, etc. L’une des ambitions de ce blog est de s’appuyer le plus possible sur les résultats de travaux empiriques consacrés à l’évaluation des politiques publiques françaises ainsi que sur les enseignements des réformes économiques menées à l’étranger.
Mais rien ne serait plus faux que de nous présenter comme des donneurs de leçons psychorigides et insensibles à la dérision. Car bien qu’économistes, nous n’en demeurons pas moins gaulois : c’est pourquoi nous ne nous interdirons pas de ponctuer ici et là ce blog de billets d’humeur, au ton forcément subjectif et partial…
Longue vie à Ecopublix, par Toutatis !
_Ecopublix_
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