Une des mesures phare de la politique de l’emploi de l'année 2007 est la fameuse loi TEPA, en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat. Cette loi a fait l'objet de nombreuses analyses, portant essentiellement sur son impact sur la demande de travail des entreprises et sur les comportements d'optimisation fiscale qu'elle risque de provoquer. Les effets de la défiscalisation des heures supplémentaires sur l'offre de travail des salariés ont a quant à eux été relativement négligés. Or on a de bonnes raisons de penser que l'impact de la loi TEPA sur le volume d'heures travaillées sera faible et que son principal effet sera d'organiser un transfert de revenu des classes moyennes vers les classes aisées.
I/ Quelles sont les principales mesures de la loi TEPA ?
L'article 1 de la loi contient une disposition fiscale dont l'objectif déclaré est de permettre aux salariés d'augmenter leur pouvoir d'achat par l'allongement de leur temps de travail et d'inciter les entreprises à permettre ces allongements de temps de travail.
Pour encourager les salariés à faire plus d'heures (donc augmenter leur offre de travail), les revenus tirés des heures supplémentaires sont exonérés de l'impôt sur le revenu et de l'ensemble des charges salariales (chômage, assurance maladie, retraite de base et complémentaire, CSG et CRDS) : autrement dit, la rémunération des heures supplémentaires a été augmentée.
Pour inciter les entreprises à accorder plus d'heures supplémentaires (donc augmenter leur demande de travail), des réductions forfaitaires des cotisations patronales sont accordés : 0,50 € par heure supplémentaire pour les entreprises de plus de 20 salariés et 1,50 € par heure supplémentaire pour les entreprises de moins de 20 salariés. Pour ces dernières entreprises cependant, il faut noter que la diminution des charges patronales est compensée par une augmentation de la majoration du salaire des heures supplémentaires, celle-ci passant de 10 % à 25 %. Ainsi, le gain pour les petites entreprises n'existe que pour des salaires très proches du Smic, s'annule un peu avant 1,5 Smic et devient négatif au-delà.
II/ Les effets sur la demande de travail
La loi TEPA a suscité un grand nombre de commentaires, y compris avant qu'elle soit réellement discutée au parlement. Le plus souvent, les débats ont porté sur la question de savoir si les employés ont réellement la possibilité de choisir combien d'heures supplémentaires ils souhaitent effectuer. Cela dépend bien évidemment du pouvoir de négociation du salarié qui varie selon le type d'emploi, mais surtout de l'incitation qu'ont les employeurs à demander à leurs salariés de faire plus d'heures supplémentaires. Sur ce dernier point, l'impact de loi TEPA est susceptible de varier sensiblement selon le type d'entreprise considéré : comme indiqué plus haut, la loi rend la fiscalité des heures supplémentaires plus avantageuse pour les grandes entreprises, mais pas pour les petites lorsqu'elles versent des salaires supérieurs à 1,5 Smic. Par conséquent, l'effet de la défiscalisation des heures supplémentaires sur la demande de travail va surtout concerner les grandes entreprises.
On peut craindre par ailleurs qu'une grande partie de l'augmentation des heures supplémentaires déclarées ne corresponde pas à une augmentation réelle de l'activité économique. La défiscalisation des heures supplémentaires comporte en effet un risque sérieux de favoriser des comportements d'optimisation fiscale, puisque les entreprises auront intérêt à faire passer en heures supplémentaires des heures auparavant effectuées dans le régime normal, afin de bénéficier d'une fiscalité avantageuse sans pour autant changer quoi que ce soit à la durée effective du travail.
II/ Les effets sur l'offre de travail
Intéressons-nous maintenant aux effets probables de la défiscalisation des heures supplémentaires sur l'offre de travail, c'est-à-dire sur le nombre d'heures de travail que souhaitent effectuer les salariés.
Taux marginal versus taux moyen
En théorie, l’impact de la fiscalité sur l’offre de travail est assez complexe, voire ambigu. La taxation des revenus du travail a en effet deux effets qui vont dans des sens opposés :
1/ L'effet du taux marginal : comme l'a expliqué Manix, le taux marginal correspond au taux de prélèvement applicable au dernier euro gagné. Une diminution du taux marginal a plutôt tendance à encourager l'augmentation de l'offre de travail, car le supplément de travail réalisé par le salarié est mieux rémunéré. « Travailler plus » vaut plus le coup.
2/ L'effet du taux moyen : le taux moyen correspond au taux de prélèvement applicable sur l'ensemble des euros gagnés. L'effet d'une diminution du taux moyen est opposé à celui d'une augmentation du taux marginal : en augmentant les revenus après impôt du salarié, une diminution du taux moyen de prélèvement incite à travailler moins car plus on gagne d'argent, plus on préfère consacrer du temps au loisir.
A priori, l'effet de la loi TEPA sur l'offre de travail devrait donc être ambigu : d'un côté, en diminuant le taux marginal de prélèvement sur les revenus du travail, la loi devrait inciter les salariés à travailler plus ; mais d'un autre côté, en diminuant le taux moyen de prélèvement, elle devrait les inciter à travailler moins.
En réalité, comme indiqué dans le post que j'avais consacré à l'impôt sur le revenu, le cas de la France est assez particulier : le système d’imposition du revenu français présente des taux marginaux assez élevés, du fait des barèmes, mais des taux moyens très faibles du fait des très nombreuses déductions fiscales, réductions et crédits d’impôt. Surtout, l'effet de la loi TEPA sur le taux moyen de prélèvement sera faible, puisque par définition, la défiscalisation des heures supplémentaires ne concernera qu'une fraction relativement faible du total des heures travaillées (heures normales et heures supplémentaires) par un salarié . Dans ces conditions, l'effet de la loi TEPA transitera surtout par la baisse du taux marginal de prélèvement sur les salaires.
Qui seront les gagnants et les perdans de la réforme ?
La défiscalisation des heures supplémentaires pourrait donc apparaître comme une réforme idyllique, puisqu'elle incitera les salariés a faire plus d'heures supplémentaires en réduisant le taux marginal de prélèvement, sans les désincter à travailler puisqu'elle aura très peu d'effet sur le taux moyen. Cependant, il convient de savoir si cette augmentation sera importante ou faible. En effet, si elle est faible, la mesure n'aura qu'un effet négligeable sur la production totale (le PIB) et aura un coût positif sur la collectivité (le supplément de recettes générés par un volume d'heures travaillées plus important n'étant pas suffisant pour compenser les pertes de recettes engendrées par les exonérations fiscales). Si tel est le cas, la loi TEPA consistera essentiellement en un transfert des agents qui ne font pas d'heures supplémentaires (et qui paieront d'autres prélèvements obligatoires pour équilibrer le budget national) vers ceux qui en font : les « gagnants » de la réforme se trouveront du côté des salariés qui vont faire beaucoup d'heures supplémentaires en plus, les « perdants » du côté de ceux qui ne vont pas en faire plus. Une vrai question d'équité se poserait alors.
Ce point a été relevé par les économistes Patrick Artus, Pierre Cahuc et André Zylberberg dans le rapport qu'ils ont rédigé pour le Conseil d'Analyse Economique en août dernier, intitulé Temps de travail, revenu et emploi. Ils montrent que la défiscalisation des heures supplémentaires aura des effets contrastés sur le pouvoir d'achat des salariés : d'un côté, les salariés qui font déjà des heures supplémentaires devraient en faire plus, ce qui va augmenter leur pouvoir d'achat ; mais d'un autre côté, la réforme risque de diminuer le pouvoir d'achat des salariés qui ne font pas aujourd'hui d'heures supplémentaires, ainsi que celui des inactifs et des chômeurs, puisque la défiscalisation aura nécessairement pour effet de une diminuer les recettes publiques, qui devront être compensées par la hausse d'autres formes de prélèvements obligatoires.
Pour déterminer quels seront parmi les salariés les « gagnants » et les « perdants » de la réforme, on peut s'appuyer sur un petit schéma de l'équilibre du marché du travail. Le graphique suivant montre comment le nombre d'heures supplémentaires varie en fonction de la réactivité des salariés à la rémunération des heures supplémentaires :
Les courbes noires représentent la demande de travail payés en heures supplémentaires des entreprises en fonction du salaire qu'elles ont à payer. La courbe noire en traits pleins correspond à la situation initiale (avant la défiscalisation). Lorsque qu'on défiscalise les heures supplémentaires, le coût des heures supplémentaires pour l'employeur diminue : par conséquent, la demande de travail rémunéré en heures supplémentaires va s'accroître (la courbe en traits pleins se déplace vers la courbe en pointillés), c'est-à-dire que les entreprises vont augmenter le nombre d'heures supplémentaires qu'elles demandent à leurs salariés. L'effet de cet accroissement de la demande de travail sur le nombre d'heures supplémentaires réalisées va dépendre de la pente de la courbe d'offre de travail de salariés : si l'offre de travail des salariés est très sensible au salaire (courbe bleue), l'augmentation du nombre d'heures supplémentaires (H2) sera forte ; inversement, si la réactivité des salariés est faible (courbe rouge), l'augmentation du nombre d'heures supplémentaires (H1) sera faible. Les « gagnants » de la réforme sont ceux qui vont augmenter le plus leur volume d'heures supplémentaire : ils sont représentés par la courbe bleue. les « perdants » sont ceux qui vont augmenter le moins leur volume d'heures supplémentaires : ils sont représentés par la courbe rouge.
Qui sont les salariés correspondant à l'un et l'autre cas ? Il existe un relatif un consensus sur ce point parmi les économistes. Dans cet article, Jonathan Gruber et Emmanuel Saez résument résument les principaux résultats des différentes études empiriques menées sur le sujet : la principale conclusion est que les classes moyennes sont surtout sensibles aux taux moyens et peu aux taux marginaux, alors les salariés les plus riches réagissent plus fortement aux incitations liées aux taux marginaux d’imposition. Par ailleurs, il semblerait les femmes répondent globalement bien plus que les hommes aux incitations.
La défiscalisation des heures supplémentaires ne devrait donc avoir pratiquement aucun impact sur le volume d'heures supplémentaires réalisées par les salariés des classes moyennes, c'est-à-dire la très grande majorité, et augmenter la demande d'heures supplémentaires du très haut de la distribution des salaires. Les gagnants à la réforme sont donc à chercher du côté des salariés les mieux payés, les perdants du côté des moins bien payés. On poura toujours rétorquer que la loi pourrait quand même avoir un impact positif sur la demande de travail non qualifié si on suppose qu’il existe une complémentarité entre travail très qualifié et travail moins qualifié (si une entreprise fait travailler davantage ses ingénieurs, elle aura besoin de faire travailler davantage ses ouvriers) ; s'il existe, cet effet demeurera néanmoins faible.
L'effet « anti-redistributif » de la défiscalisation des heures supplémentaires ne s'arrête pas là : dans la mesure où les cotisations retraite existent jusqu'à un plafond assez élevé de salaire et que les hauts salaires sont ceux qui devraient le plus réagir à la loi, cette exonération des heures supplémentaires, qui touche en particulier les cotisations sociales, revient en partie à une subvention publique des retraites des plus riches.
L'effet sur l'offre de travail des femmes
Les arguments passés en revue jusqu'à présent semblent indiquer que la loi TEPA aura surtout pour effet d'organiser une redistribution « à l’envers », au détriment des classes moyennes et en faveur des salariés les mieux payés, pour un bénéfice relativement faible en termes d'activité économique. On pourrait néanmoins défendre la mesure en se concentrant sur le cas des femmes : la théorie économique suggère en effet qu'une telle exonération pourrait avoir un impact positif et significatif sur leur offre de travail.
En réalité, on constate empiriquement que les incitations fiscales jouent surtout sur la décision des femmes de participer ou non au marché du travail ou sur leur décision de travailler à temps plein ou à temps partiel, mais pas tellement sur le nombre d'heures travaillées. Or la défiscalisation des heures supplémentaires ne modifiera pas l'arbitrage entre travail et inactivité, pas plus qu'elle ne modifiera l'arbitrage entre temps partiel et temps plein. On peut donc penser que cette loi n’est n'aura pas particulièrement d'impact sur l'offre de travail des femmes.
Au total, l'analyse économique suggère que la loi TEPA n'a rien de la potion magique dont certains semblent rêver et que le « travailler plus » des uns risque surtout de se traduire par le « gagner moins » des autres.
I/ Quelles sont les principales mesures de la loi TEPA ?
L'article 1 de la loi contient une disposition fiscale dont l'objectif déclaré est de permettre aux salariés d'augmenter leur pouvoir d'achat par l'allongement de leur temps de travail et d'inciter les entreprises à permettre ces allongements de temps de travail.
Pour encourager les salariés à faire plus d'heures (donc augmenter leur offre de travail), les revenus tirés des heures supplémentaires sont exonérés de l'impôt sur le revenu et de l'ensemble des charges salariales (chômage, assurance maladie, retraite de base et complémentaire, CSG et CRDS) : autrement dit, la rémunération des heures supplémentaires a été augmentée.
Pour inciter les entreprises à accorder plus d'heures supplémentaires (donc augmenter leur demande de travail), des réductions forfaitaires des cotisations patronales sont accordés : 0,50 € par heure supplémentaire pour les entreprises de plus de 20 salariés et 1,50 € par heure supplémentaire pour les entreprises de moins de 20 salariés. Pour ces dernières entreprises cependant, il faut noter que la diminution des charges patronales est compensée par une augmentation de la majoration du salaire des heures supplémentaires, celle-ci passant de 10 % à 25 %. Ainsi, le gain pour les petites entreprises n'existe que pour des salaires très proches du Smic, s'annule un peu avant 1,5 Smic et devient négatif au-delà.
II/ Les effets sur la demande de travail
La loi TEPA a suscité un grand nombre de commentaires, y compris avant qu'elle soit réellement discutée au parlement. Le plus souvent, les débats ont porté sur la question de savoir si les employés ont réellement la possibilité de choisir combien d'heures supplémentaires ils souhaitent effectuer. Cela dépend bien évidemment du pouvoir de négociation du salarié qui varie selon le type d'emploi, mais surtout de l'incitation qu'ont les employeurs à demander à leurs salariés de faire plus d'heures supplémentaires. Sur ce dernier point, l'impact de loi TEPA est susceptible de varier sensiblement selon le type d'entreprise considéré : comme indiqué plus haut, la loi rend la fiscalité des heures supplémentaires plus avantageuse pour les grandes entreprises, mais pas pour les petites lorsqu'elles versent des salaires supérieurs à 1,5 Smic. Par conséquent, l'effet de la défiscalisation des heures supplémentaires sur la demande de travail va surtout concerner les grandes entreprises.
On peut craindre par ailleurs qu'une grande partie de l'augmentation des heures supplémentaires déclarées ne corresponde pas à une augmentation réelle de l'activité économique. La défiscalisation des heures supplémentaires comporte en effet un risque sérieux de favoriser des comportements d'optimisation fiscale, puisque les entreprises auront intérêt à faire passer en heures supplémentaires des heures auparavant effectuées dans le régime normal, afin de bénéficier d'une fiscalité avantageuse sans pour autant changer quoi que ce soit à la durée effective du travail.
II/ Les effets sur l'offre de travail
Intéressons-nous maintenant aux effets probables de la défiscalisation des heures supplémentaires sur l'offre de travail, c'est-à-dire sur le nombre d'heures de travail que souhaitent effectuer les salariés.
Taux marginal versus taux moyen
En théorie, l’impact de la fiscalité sur l’offre de travail est assez complexe, voire ambigu. La taxation des revenus du travail a en effet deux effets qui vont dans des sens opposés :
1/ L'effet du taux marginal : comme l'a expliqué Manix, le taux marginal correspond au taux de prélèvement applicable au dernier euro gagné. Une diminution du taux marginal a plutôt tendance à encourager l'augmentation de l'offre de travail, car le supplément de travail réalisé par le salarié est mieux rémunéré. « Travailler plus » vaut plus le coup.
2/ L'effet du taux moyen : le taux moyen correspond au taux de prélèvement applicable sur l'ensemble des euros gagnés. L'effet d'une diminution du taux moyen est opposé à celui d'une augmentation du taux marginal : en augmentant les revenus après impôt du salarié, une diminution du taux moyen de prélèvement incite à travailler moins car plus on gagne d'argent, plus on préfère consacrer du temps au loisir.
A priori, l'effet de la loi TEPA sur l'offre de travail devrait donc être ambigu : d'un côté, en diminuant le taux marginal de prélèvement sur les revenus du travail, la loi devrait inciter les salariés à travailler plus ; mais d'un autre côté, en diminuant le taux moyen de prélèvement, elle devrait les inciter à travailler moins.
En réalité, comme indiqué dans le post que j'avais consacré à l'impôt sur le revenu, le cas de la France est assez particulier : le système d’imposition du revenu français présente des taux marginaux assez élevés, du fait des barèmes, mais des taux moyens très faibles du fait des très nombreuses déductions fiscales, réductions et crédits d’impôt. Surtout, l'effet de la loi TEPA sur le taux moyen de prélèvement sera faible, puisque par définition, la défiscalisation des heures supplémentaires ne concernera qu'une fraction relativement faible du total des heures travaillées (heures normales et heures supplémentaires) par un salarié . Dans ces conditions, l'effet de la loi TEPA transitera surtout par la baisse du taux marginal de prélèvement sur les salaires.
Qui seront les gagnants et les perdans de la réforme ?
La défiscalisation des heures supplémentaires pourrait donc apparaître comme une réforme idyllique, puisqu'elle incitera les salariés a faire plus d'heures supplémentaires en réduisant le taux marginal de prélèvement, sans les désincter à travailler puisqu'elle aura très peu d'effet sur le taux moyen. Cependant, il convient de savoir si cette augmentation sera importante ou faible. En effet, si elle est faible, la mesure n'aura qu'un effet négligeable sur la production totale (le PIB) et aura un coût positif sur la collectivité (le supplément de recettes générés par un volume d'heures travaillées plus important n'étant pas suffisant pour compenser les pertes de recettes engendrées par les exonérations fiscales). Si tel est le cas, la loi TEPA consistera essentiellement en un transfert des agents qui ne font pas d'heures supplémentaires (et qui paieront d'autres prélèvements obligatoires pour équilibrer le budget national) vers ceux qui en font : les « gagnants » de la réforme se trouveront du côté des salariés qui vont faire beaucoup d'heures supplémentaires en plus, les « perdants » du côté de ceux qui ne vont pas en faire plus. Une vrai question d'équité se poserait alors.
Ce point a été relevé par les économistes Patrick Artus, Pierre Cahuc et André Zylberberg dans le rapport qu'ils ont rédigé pour le Conseil d'Analyse Economique en août dernier, intitulé Temps de travail, revenu et emploi. Ils montrent que la défiscalisation des heures supplémentaires aura des effets contrastés sur le pouvoir d'achat des salariés : d'un côté, les salariés qui font déjà des heures supplémentaires devraient en faire plus, ce qui va augmenter leur pouvoir d'achat ; mais d'un autre côté, la réforme risque de diminuer le pouvoir d'achat des salariés qui ne font pas aujourd'hui d'heures supplémentaires, ainsi que celui des inactifs et des chômeurs, puisque la défiscalisation aura nécessairement pour effet de une diminuer les recettes publiques, qui devront être compensées par la hausse d'autres formes de prélèvements obligatoires.
Pour déterminer quels seront parmi les salariés les « gagnants » et les « perdants » de la réforme, on peut s'appuyer sur un petit schéma de l'équilibre du marché du travail. Le graphique suivant montre comment le nombre d'heures supplémentaires varie en fonction de la réactivité des salariés à la rémunération des heures supplémentaires :
Les courbes noires représentent la demande de travail payés en heures supplémentaires des entreprises en fonction du salaire qu'elles ont à payer. La courbe noire en traits pleins correspond à la situation initiale (avant la défiscalisation). Lorsque qu'on défiscalise les heures supplémentaires, le coût des heures supplémentaires pour l'employeur diminue : par conséquent, la demande de travail rémunéré en heures supplémentaires va s'accroître (la courbe en traits pleins se déplace vers la courbe en pointillés), c'est-à-dire que les entreprises vont augmenter le nombre d'heures supplémentaires qu'elles demandent à leurs salariés. L'effet de cet accroissement de la demande de travail sur le nombre d'heures supplémentaires réalisées va dépendre de la pente de la courbe d'offre de travail de salariés : si l'offre de travail des salariés est très sensible au salaire (courbe bleue), l'augmentation du nombre d'heures supplémentaires (H2) sera forte ; inversement, si la réactivité des salariés est faible (courbe rouge), l'augmentation du nombre d'heures supplémentaires (H1) sera faible. Les « gagnants » de la réforme sont ceux qui vont augmenter le plus leur volume d'heures supplémentaire : ils sont représentés par la courbe bleue. les « perdants » sont ceux qui vont augmenter le moins leur volume d'heures supplémentaires : ils sont représentés par la courbe rouge.
Qui sont les salariés correspondant à l'un et l'autre cas ? Il existe un relatif un consensus sur ce point parmi les économistes. Dans cet article, Jonathan Gruber et Emmanuel Saez résument résument les principaux résultats des différentes études empiriques menées sur le sujet : la principale conclusion est que les classes moyennes sont surtout sensibles aux taux moyens et peu aux taux marginaux, alors les salariés les plus riches réagissent plus fortement aux incitations liées aux taux marginaux d’imposition. Par ailleurs, il semblerait les femmes répondent globalement bien plus que les hommes aux incitations.
La défiscalisation des heures supplémentaires ne devrait donc avoir pratiquement aucun impact sur le volume d'heures supplémentaires réalisées par les salariés des classes moyennes, c'est-à-dire la très grande majorité, et augmenter la demande d'heures supplémentaires du très haut de la distribution des salaires. Les gagnants à la réforme sont donc à chercher du côté des salariés les mieux payés, les perdants du côté des moins bien payés. On poura toujours rétorquer que la loi pourrait quand même avoir un impact positif sur la demande de travail non qualifié si on suppose qu’il existe une complémentarité entre travail très qualifié et travail moins qualifié (si une entreprise fait travailler davantage ses ingénieurs, elle aura besoin de faire travailler davantage ses ouvriers) ; s'il existe, cet effet demeurera néanmoins faible.
L'effet « anti-redistributif » de la défiscalisation des heures supplémentaires ne s'arrête pas là : dans la mesure où les cotisations retraite existent jusqu'à un plafond assez élevé de salaire et que les hauts salaires sont ceux qui devraient le plus réagir à la loi, cette exonération des heures supplémentaires, qui touche en particulier les cotisations sociales, revient en partie à une subvention publique des retraites des plus riches.
L'effet sur l'offre de travail des femmes
Les arguments passés en revue jusqu'à présent semblent indiquer que la loi TEPA aura surtout pour effet d'organiser une redistribution « à l’envers », au détriment des classes moyennes et en faveur des salariés les mieux payés, pour un bénéfice relativement faible en termes d'activité économique. On pourrait néanmoins défendre la mesure en se concentrant sur le cas des femmes : la théorie économique suggère en effet qu'une telle exonération pourrait avoir un impact positif et significatif sur leur offre de travail.
En réalité, on constate empiriquement que les incitations fiscales jouent surtout sur la décision des femmes de participer ou non au marché du travail ou sur leur décision de travailler à temps plein ou à temps partiel, mais pas tellement sur le nombre d'heures travaillées. Or la défiscalisation des heures supplémentaires ne modifiera pas l'arbitrage entre travail et inactivité, pas plus qu'elle ne modifiera l'arbitrage entre temps partiel et temps plein. On peut donc penser que cette loi n’est n'aura pas particulièrement d'impact sur l'offre de travail des femmes.
Au total, l'analyse économique suggère que la loi TEPA n'a rien de la potion magique dont certains semblent rêver et que le « travailler plus » des uns risque surtout de se traduire par le « gagner moins » des autres.
9 commentaires:
Bonjour, merci pour le post.
Sur le cas des femmes, j'avais une autre analyse, qui rendait la TEPA redoutablement conservatrice:
Soit un ménage modèle avec enfants, dont la femme fait 35h (+ taches ménagères) et l'homme fait quelques heures sup, mettons 40h par semaine (et peu de tâches ménagères). Ben à leur place, pour gagner plus, je suggère que par exemple l'un se mette à 27.5h (et fait toutes les tâches ménagères), et l'autre fait 47.5 heures par semaine. Mon analyse, c'est que comme par hasard, ce sont les femmes qui retournent à la maison pour d'objectives raisons financières...
J'ai juste? C'est possible comme raisonnement?
Il me semble que votre conclusion repose sur un nombre tellement important d'approximations qu'elle en perd beaucoup de sa pertinence.
D'abord, vous avez laissé en chemin les entreprises de moins de 20, dont les salariés les moins qualifiés sont concernés par le dispositif (jusqu'à 1,5 SMIC).
Ensuite, il me paraît difficile d'idéaliser comme vous le faites le mécanisme offre/demande d'heures sup: d'une part, comme vous le faites remarquer, ça dépend fortement du rapport de forces employeur/ salarié sur un secteur ou une entreprises donnés; d'autre part, la faculté du salarié à refuser les heures sup proposées par l'employeur peut être mise en doute dans bien des cas; s'il s'avère que ces cas sont majoritaires, l'effet différencié du taux marginal ou du taux moyen sur les catégories de salariés s'estompe fortement.
Quant aux salariés les mieux payés, si vous faites référence aux cadres sups, je n'en ai encore jamais vu déclarer des heures supplémentaires (ni même parmi les cadres moyens d'ailleurs). Le nouveau régime fiscal va changer ça, sans doute: mais il sera très difficile à l'employeur de baisser les salaires et de verser la compensation en heures sup; il est plus probable que ce sont les augmentations futures qui se feront par le biais de la déclaration d'heures supplémentaires, que les salariés effectuent souvent déjà (un cadre ça compte rarement ses heures). Ca me paraît plutôt vertueux, sur le principe. Si les employeurs de la com pouvaient prendre l'habitude de payer les heures sup... Je plaisante, je ne rêve pas.
La question des heures sup, à mon avis, concerne bien davantage les salaires les plus bas, dans les entreprises à forte composante "main-d'oeuvre", qui suite aux 35 heures ont eu recours davantage à l'intérim et aux contrats temporaires pour les "coups de bourre", et qui vont pouvoir désormais y faire face avec des heures sup. J'aurais donc tendance à penser que la loi favorise (pour changer) les insiders, et consolide le CDI.
Bon, et puis pour continuer à être un peu désagréable, y a-t-il vraiment besoin d'une longue explication et d'un savant schéma pour démontrer qu'en accroissant la rémunération des heures sup, on favorise ceux qui en font par rapport à ceux qui n'en font pas?... Il me semble que c'est quand même un peu le but du dispositif, non?
Un effet d'hystérèse ne serait- il pas possible en cas de conjoncture favorable? L'employeur aurait alors intérêt à augmenter les heures sup et donc favoriser les insiders au détriment des chômeurs.
bilan tepa :
http://www.premierministre.gouv.fr/acteurs/gouvernement/conseils_ministres_35/conseil_ministres_9_janvier_1236/premier_bilan_application_loi_58891.html
Dans quasiment toutes les entreprises, les cadres (moyens ou supérieurs) ont une rémunération au forfait. Ils ne sont donc pas payés à l'heure mais à la mission, et peu importe le nombre d'heures travaillées.
Il me semble donc que les hauts salaires - et une bonne partie des salaires moyens - ne sont absolument pas concernés par cette mesure (sauf peut-être les médecins urgentistes, qui non seulement semblent être les seuls à se faire payer leurs heures sup, mais en plus arrivent à nous faire pleurer sur leur sort...).
Il reste donc de réfléchir à l'impact de la mesure sur les SEULS salariés concernés, c'est-à-dire les classes moyennes et les bas salaires (dont vous ne semblez pas parler, ce qui est je trouve un oubli... étrange, pour ne pas dire coupable).
Et là encore, j'en suis désolé, mais malgré une très belle courbe colorée, il me semble que votre raisonnement est complètement faux.
Malgré le "relatif un consensus sur ce point parmi les économistes", et je sais que cela ne plaira pas à Jonathan Gruber et Emmanuel Saez, mais en terme de motivation à faire des heures sup, donc d'élasticité de l'offre de travail, vous ne pouvez pas comparer de la même manière la motivation de celui qui va faire des heures sup pour épargner parce qu'il n'en a pas réellement besoin (classe moyenne), et celui qui va multiplier par 2 son pouvoir d'achat (bas salaires).
Je rappelle juste qu'un smicard, avec des frais fixes (loyer + tous frais de logement + nourriture + voiture + impots s'il en paye) de 850 euros, a un pouvoir d'achat de 150 euros. Et là je parle d'un privilégié qui bosse à plein temps.
Donc pour lui, faire quelques heures sup pour avoir un bonus de 100 euros, c'est énorme.
Et même de pouvoir gagner 50 euros de plus par mois c'est pas négligeable, ça lui fait une hausse de pouvoir d'achat de 30%, et ce, quelle que soit sa "sensibilité aux taux marginaux" !!!
:D
Vous ne me ferez donc jamais croire, malgré "le concensus des économistes", que l'offre de travail d'un Smicard est peu élastique, sous le prétexte qu'il gagnerait moins à faire des heures sup qu'un pdg du cac40.
En réalité, et ce peut importe la forme de la courbe, L'OFFRE DE TRAVAIL DES SALARIES LES MOINS PAYES EST en général, LA PLUS ELASTIQUE DE TOUS LES SALARIES (excepté bien sur certains cas très particuliers, comme les traiders je suis d'accord).
Bon, je connais quand même une personne qui n'est pas dans ce cas. Il travaille dans le bâtiment, et préfère bosser au noir pendant ses we que de faire des heures supplémentaires. Il a donc trouvé le moyen de diminuer son taux marginal au maximum (même s'il ne sait pas ce qu'est un taux marginal, et donc qu'il n'y est sans doute "pas très sensible", j'aimerais bien savoir d'où viennent les affirmations du "consensus des économistes"... j'en suis désolé, mais ça fait peur si beaucoup d'économistes pensent ce genre de choses... peut-être qu'il a bien fait de ne pas prendre que des économistes dans sa commission Attali non ?).
Hé hé ! Là je sais que je risque de susciter des réactions indignées !! :D
Sinon pour ce qui est des femmes, la situation de la sienne semble s'accorder avec le fait qu'elles semblent sensibles aux incitations : elle fait souvent des ménages au noir les jours où elle ne travaille pas.
Donc à mon humble avis de non économiste qui vaut ce qu'il vaut, cet exemple montre à quel point diminuer le taux marginal d'imposition des bas salaire est très utile dans la pratique, même si certains ont déjà pris les devants.
Et cela montre aussi, que même un mauvais en économie comme moi, peut faire la leçon à quelqu'un d'infiniment plus compétent dans cette matière, seulement parce qu'il ne faut jamais oublier de quoi on parle concrêtement.
Sinon, j'ai un peu l'impression, que quoi que ce gouvernement fasse, nombreux sont ceux qui sont toujours prêt à critiquer et dénigrer. Finalement, un raisonnement est juste s'il permet de conclure que Sarkozy et toute sa clique ne vont vraiment pas dans la bonne direction, ne comprennent vraiment rien à rien et ne sont qu'une bande de débiles profonds incompétents.
N'oubliez pas qu'il n'y a que ceux qui ne font rien qui ne se trompent pas, et que voir toujours le verre à moitié vide ne fera de bien à personne.
J'espère que l'analyse des conclusions du rapport d'Attali - que vous ne manquerez pas de faire sur ce site j'espère - ne sera pas aussi partial que ce document, et qu'il mettra aussi bien l'accent sur ses côtés positifs que négatifs.
Cordialement
@ Willy : Le raisonnement théorique me semble tout à fait plausible. Pour savoir si ce mécanisme aurait réellement lieu de manière fréquente, il faudra encore attendre…
@ FC : Je suis à peu près d’accord avec l’ensemble de votre commentaire (qui par ailleurs ne contredit pas vraiment le post), mis à part le point concernant les cadres. Les cadres sont le plus souvent au forfait, et il a été prévu pour eux que le dispositif s’appliquerait aux jours de RTT non pris. Ils sont ainsi concernés par la mesure et il convient donc de les prendre en compte.
@ Anonyme : Ce bilan est tout de même très peu documenté ; en particulier, il n’est question d’aucune comparaison entre nombre d’heures supplémentaires avant et après la réforme. Il se contente de dire qu’il y a eu des heures supplémentaires après la réforme (en donnant le nombre brut, ce qui est peu informatif) et que ces heures supplémentaires ont pu faire bénéficier des employeurs et des employés des mesures les concernant (à nouveau avec les chiffres brut).
@ Jaggy : Pour les cadres et la rémunération au forfait, cf. la réponse faite à FC.
Pour ce qui est des élasticités des employés à bas salaires, il me semble que vous faites une confusion. Vous dites que 100 € sur 1 mois représente beaucoup pour un smicard, et je ne peux qu’être d’accord avec vous. Mais vous avez l’air de suggérer qu’avant la réforme, les heures supplémentaires n’étaient pas rémunérées du tout, ce qui n’était évidemment pas le cas. Ce que l’on nomme élasticité de l’offre de travail est la différence d’heures supplémentaires que le salarié souhaite faire selon le niveau de la rémunération, en l’occurrence si on le rémunère de manière nette à 10,55 € (25 % du smic horaire brut) ou à 8,29 € (25 % du smic horaire net). D’après votre propre exemple, ledit smicard accepterait toutes les heures supplémentaires à sa disposition si elles n’étaient rémunérées qu’à 8,29 €, et ne pourrait donc pas en accepter plus. Ce qui semble accréditer la thèse d’une élasticité faible de l’offre de travail des employés à bas salaires.
Pour l’exemple de la femme de votre connaissance, il convient de savoir si elle fait ces heures de ménage au noir en plus d’un travail à plein temps (et donc à la place d’heures supplémentaires dans son travail principal), ou à la place de tout ou partie d’un travail déclaré. Dans ce dernier cas, on reviendrait à l’argument que la loi n’aurait que peu d’influence sur elle puisque les 35 premières heures d’un travail déclaré ne seraient pas exonérées des charges et taxes.
Si la question est de savoir si le salarié à bas revenus va être encore plus motivé à travailler plus avec cette mesure, j'ai envie de dire oui certainement. Mais est-ce cela va faire une grosse différence avec la situation d'avant la réforme, là effectivement on peut en douter. Sa motivation était, est, et restera forte quoi qu'il arrive.
Dans ce sens vous avez certainement raison, son élasticité sera plutôt faible, j'en convient.
Mais finalement peu importe non ?
Ce qui compte c'est bien de répondre à la question que vous posez : qui va bénéficier de cette mesure, non ?
- ainsi, pour les salariés à bas salaires (ou à salaires moyens non cadres) qui sont l'immense majorité des salariés à faire des heures supplémentaires, il me semble qu'ils bénéficieront bien de la mesure. Pour un Smicard qui va travailler 39h comme avant au lieu à 35h, cela ferait 32euros supplémentaires par mois (différence après/avant la réforme), ce qui n'est pas négligeable.
- Mais plus important que de savoir ce qui se passe dans la motivation des salariés à bas revenus, il faut surtout que les employeurs soient incités à augmenter les heures supplémentaires en fonction de leurs besoins. C'est plutôt là le noeud du problème.
Donc en réalité, plus que l'élasticité des salariés à bas revenus, c'est l'élasticité des employeurs à offrir des heures supplémentaires qui compte.
A-t-on une idée de l'élasticité taux d'imposition marginale sur l'offre d'heures supplémentaires proposées par l'employeur ?
- pour les cadres, nous verrons si cela est mis en place, mais en étant un moi-même, je ne suis pas vraiment sûr de vouloir me passer de mes RTT. Je n'ai pas vraiment besoin de beaucoup plus d'argent (faut pas le répéter à mon employeur !!), en tout cas pas forcément au détriment de mes jours de congés supplémentaires.
Enfin on verra bien, mais cela semble difficile d'affirmer quoi que ce soit, et ce quelle que soit notre "sensibilité au taux marginaux"...
Pour trouver "qui est le gagnant" (s'il faut forcément en trouver un...), en nombre d'heures supplémentaires, ou si vous voulez, en pourcentage de revenus supplémentaires, là on peut être à peu près certain que ce sont les bas revenus qui vont être les gagnants.
Mais pour ce qui est de savoir qui des uns ou des autres vont bénéficier des plus hautes augmentations de salaires nettes, là mystère.
Mais finalement, est-ce que cela est vraiment si important que cela ? A partir du moment où on sait que les salariés les moins payés vont majoritairement bénéficier du dispositif...
Si vous voulez mon humble avis de non économiste (qui serait peut-être un jour tenté par créer son entreprise), je pense que si dès que vous modifiez le droit du travail, vous vous fixez un trop grand nombre de contraintes (par exemple une obligation absolue que tout soit toujours plus intéressant pour une catégorie de salariés très hétérogène, de ne pas léser des copains influents, mais en plus de résoudre le pb de la faim dans le monde et donc de privilégier les investissements dans les associations caritatives...), vous ne vous en sortez pas, ou en tout cas vous compliquez inutilement les choses.
A mon avis vous pouvez arriver à peu près au même résultat global, si vous différenciez les rôles de chaque mesure pour améliorer leur visibilité : certaines lois pour inciter tout le monde à travailler plus, d'autres pour redistribuer des hauts vers les bas salaires, etc.
Donc ce qui compte c'est LA GLOBALITE du dispositif, pas chaque mesure prise séparément.
En somme, s'il y a besoin de faire de la redistribution des hauts vers les bas salaires, les impots sont là pour ça. S'il faut modifier les équilibres dans cette matière, il suffit donc de modifier les tranches d'imposition. Il me semble donc pas forcément utile d'inclure cette redistribution autre part dans le droit du travail (par contre il manque de la redistribution des bénéfices des entreprises vers les salariés !).
Dites moi si cette démarche est intéressante ou si elle est vraiment inapplicable.
A mon avis, s'il y a du chomage en France, c'est aussi parce que les TPE sont dirigées par des professionnels, qui n'ont pas le temps de passer des heures à éplucher notre droit du travail, et le millier de niches fiscales dissimulées derrière chaque mot. ("l'enfer est pavé de bonnes intentions"...)
Bon, vous allez me répondre que pour ce qui est des complications, il semble que cette mesure dans son ensemble ne va pas dans le bon sens... et vous aurez raison. Il aurait sans doute mieux valu modifier les textes existants organisant les heures supplémentaires plutôt qu'en rajouter de nouveaux (je ne sais pas si c'était vraiment possible).
Mais s'il faut en plus commencer à à modifier cette mesure, pour prendre en compte les revenus des employés ou leur taux d'imposition, et pourquoi pas leur quotien familial ou le nombre d'animaux domestiques qu'ils ont à charges, là je pense que vous rendrez votre loi inutile car inappliquée par la majorité des entreprises.
:D
Sinon, pour ce qui est de mon exemple du couple (lui dans le bâtiment, elle faisant des ménages) arrondissant ses fins de mois au noir, là par contre, leur élasticité taux marginal est forte. En effet, lui par exemple, refuse systématiquement toute heure supplémentaire, car il sait qu'il peut toucher plus en travaillant avec un taux d'imposition de 0%.
On peut d'ailleurs penser que ce doit être le cas de nombreux salariés du bâtiment : ils sont tellement sûr de trouver des chantiers au noir, qu'ils ont vite fait de faire le calcul...
Mais le problème vient aussi du fait de l'élasticité taxes de la demande des clients - dont je fais partie -, qui elle atteint des sommets !
;D
Cordialement
Appliquée à la fonction publique et en particulier à l'Education nationale, la loi TEPA n'est pas en mesure de favoriser le recours au heures supplémentaires, si on a recours au seul taux marginal d'imposition pour expliquer le comportement souhaité des enseignants invités à prendre ces heures supplémentaires. En effet,les heures supplémentaires sont rémunérées de manière forfaitaire quelque soit l'ancienneté (l'échelon) et sont toujours rémunérées à un niveau inférieur des heures normales, sauf pour les quatre premières années de la carrière. La revalorisation annoncée n'a porté que sur la 2e heure supplémentaire (+9% du niveau actuel) et dans ces conditions la défiscalisation ne pourra que dans des cas très rares (cas de ceux qui sont en début de carrière et paie des impôts : célibataire et couples sans enfant)inciter à travailler plus.
En revanche du côté de l'Etat employeur, le gain est massif : exiger que les enseignants fassent des heures supplémentaires moins bien payées que leurs heures normales, cela revient à réduire le coût moyen d'une heure d'enseignement et cela premet de réduire le nombre de fonctionnaire. Seul problème, le chantage sur la disparition des options, puisque les profs du secondaire peuvent refuser les heures supplémentaires au delà de la première qui peut être imposée, a des limites : physique (les enquêtes du Ministère montre que le travail est de 40 heures par semaine, politique (les profs n'ont jamais eu droit aux 35 heures, en terme d'efficacité (accroître les heures de cours d'un prof, cela réduit son efficacité marginale... et donc les résultats français pour PISA...). Vous l'aurez compris, il suffit d'aller voir le rapport Pochard pour constater que la logique du travailler toujours plus pour gagner moins en valeur relative (raisonnement néo-classique) ne trouve sa justification que dans le cadre d'une démarche de compression de la masse salariale dans la fonction publique.
Si on ne prend plus en considération le seul effet de substitution mais l'effet revenu,on voit que pour les enseignants qui ont besoin de payer les études de leurs enfants de plus en plus chères, ou simplement leur loyer, alors là,même des heures moins bien payées font l'affaire... bref, c'est plutôt keynésien... encore qu'il ne faille pas oublier que si l'Etat avait eu la bonne idée de transformer ces heures supplémentaires sous forme de postes aux concours pour les jeunes générations, l'effet direct et indirect sur la croissance aurait été tout autre!
Mais la loi TEPA, c'est d'abord le cadeau aux plus riches.
Attendons la prochaine étude de Camille Landais ( http://www.jourdan.ens.fr/~clandais/documents/htrev.pdf )pour mesurer les effets du 2e bouclier fiscal sur les inégalités de revenus en sachant que la réduction des impôts des plus riches, cela se traduit par déjà par moins de moyens en heures à destination des élèves les plus démunis dès la rentrée 2008...
votre post devrait mieux distinguer salaire et revenu.
Si les heures supplémentaires sont mieux rémunérés à 125% des heures normales, en faisant l'hypothèse que les entreprises en proposent, l'avantage de la défiscalisation de ces heures dépend du ménage auquel vous appartenez... Si en faisant des heures supplémentaires votre taux d'imposition sur le revenu est toujours nul : où est le gain?
La moitié des ménages en France ne sont pas imposables.
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