vendredi 9 novembre 2007

Combien paie-t-on d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales ?


Le héros de la bande-dessinée IRS (le fisc américain) prétend lire la vie des individus par le biais de leur déclaration d’impôt. En France, savoir lire sa feuille de paie et sa feuille d’impôt est un exercice plutôt difficile. Combien de nos concitoyens savent combien ils gagnent vraiment, combien savent combien d’impôts et de cotisations ils paient ? Et combien ne sont pas pris par une réaction de rejet face à un système fiscal qui leur échappe ? Un post précédent avait rappelé les bases nécessaires pour répondre à la question de qui paie les impôts. Julien a expliqué avec talent qui paie les cotisations sociales. Aujourd’hui, l’objectif est d’essayer de calculer pratiquement à combien s’élèvent impôts et cotisations sociales auxquelles les salariés sont assujettis en France. Il va falloir descendre dans les ténèbres et les dédales de nos prélèvements obligatoires. Attention, ne vous retournez pas !

Le premier point à rappeler pour ceux de nos lecteurs qui auraient manqué les premiers épisodes est le fait que les cotisations sociales salariales et patronales sont payées par les salariés. Le véritable salaire d’un Français n’est donc pas son salaire brut (celui qui sert de référence officielle), mais son salaire super-brut qui inclut donc les cotisations patronales. Il n’y a aucune différence à recevoir un salaire brut de 100, avec 50% de cotisations patronales et 25% de cotisations salariales (un salaire net de 75) et recevoir un salaire brut de 150 avec 50% de cotisations salariales. Lorsqu’on parle de « travail » dans le partage de la valeur ajoutée, on inclut les salaires brut et les cotisations assises sur ces salaires. Si les économistes parlent parfois de coût du travail, pour les salariés, il est plus juste de parler des « revenus du travail ».

Le second point de clarification à rappeler à nos Gaulois non économistes est la distinction entre les impôts qui sont destinés au budget de l’Etat (le système fiscal) et les cotisations sociales qui servent à financer la protection sociale (le système social). Les deux forment les prélèvements obligatoires, c’est-à-dire des prélèvements auxquels on ne peut pas se soustraire légalement. Lorsque l’OCDE compare les niveaux de prélèvements obligatoires entre pays c’est une mesure de l’ensemble des impôts et cotisations sociales qui est présentée. En France, le montant global des prélèvements obligatoires est de 44 % du PIB pour 2005 (plus d’informations dans le projet de loi de finance 2007).

Parmi tous les prélèvements obligatoires, trois sont imposés sur les revenus des salariés : l’impôt sur le revenu (IR), les contributions sociales (CSG-CRDS) et les cotisations sociales. Combien paie-t-on de ces différents prélèvements ?

I/ Les différents barèmes de l’impôt sur le revenu, des cotisations sociales et de la CSG

Le prélèvement obligatoire le plus connu est l’impôt sur le revenu sur les personnes physiques (IRPP). Lorsque les Français se plaignent de payer trop d’impôts, c’est avant tout à l’impôt sur le revenu qu’ils pensent. Bien souvent on confond le taux de prélèvement obligatoire de 44% avec le taux marginal supérieur de l’impôt sur le revenu (« l’Etat prend la moitié de mon revenu »). En fait, l’impôt sur le revenu n’est pas imposé sur l’ensemble du salaire, mais sur le salaire net, c’est-à-dire une fois les cotisations sociales déduites. Le barème de cet impôt est progressif, c’est-à-dire que la part du revenu taxée croît avec le revenu.

La CSG et la CRDS sont des impôts sur le revenu mais qui sont affectés à la protection sociale. Ils ne sont pas progressifs, mais proportionnels au revenu brut.
Le barème des cotisations sociales est plutôt complexe car il existe de multiples cotisations sociales. Certaines ne sont pas liées au montant prélevé (cotisations maladie, invalidité, cotisations famille ou logement) et sont donc plus proches d’une imposition classique. D’autres (comme les cotisations retraite et chômage) vont donner droit à des prestations proportionnelles (selon une formule plus ou moins complexe) et correspondent à une assurance des risques de chômage et de vieillesse.

L’autre complexité du barème des cotisations sociales vient des jeux des plafonds. Les cotisations sociales sont plafonnées, c’est-à-dire que jusqu’au plafond, une cotisation sociales est calculée, puis les revenus au-dessus de ce plafond ne le sont pas. La majeure partie des cotisations sont imposées sous le plafond de la sécurité sociale. Par exemple, en 2007 les cotisations retraite du régime général se montent à 16,65 % du salaire brut jusqu’au plafond, puis à 1,7 % du salaire brut au-dessus de ce plafond. D’autres cotisations donnent lieu à des prélèvements jusqu’à 3 plafonds (chômage) et certaines jusqu’à 8 plafonds (régimes de retraite complémentaires). Ci-dessous le barème qui s’applique aux salaires en-dessous du plafond pour 2006.


Les cotisations sociales sont définies en fonction du salaire brut, qui est la référence légale du salaire, mais pas sa définition économique (je vous renvoie au post de Julien). La définition économique du salaire correspond à l’ensemble du salaire brut augmenté des cotisations sociales dites employeurs, c’est-à-dire au montant versé par l’employeur en échange du travail du salarié. Par exemple, au 1er janvier 2007, le plafond de la sécurité sociale (qui sert de référence pour de nombreuses cotisations sociales) était de 2682 Euros mensuel. Un employeur offrant ce salaire à un employé devra en fait débourser 41,48% de plus soit 3794 Euros mensuel. A l’inverse l’employé ne va pas percevoir 2682 Euros, mais un salaire net des cotisations sociales des employés (soit 13,70% du brut) et net de la CSG et de la CRDS (7,78% du brut) qui sont des impôts sur le revenu prélevés à la source, soit au total 2106 Euros. C’est ce montant net qu’il va ensuite devoir déclarer sur sa feuille d’impôt.
On peut résumer tout ce charabia dans le tableau ci-dessous pour notre salarié payé au niveau du plafond de la Sécurité sociale.


II/ Poids des différents prélèvements

Pour pouvoir mesurer correctement le poids de chaque composante des prélèvements obligatoires, il est nécessaire de les exprimer en fonction du revenu global du salarié, soit son salaire super-brut. Reprenons alors le cas de notre salarié payé au niveau du plafond de la sécurité sociale. Il gagne un salaire super-brut de 3794 Euros et après déductions des cotisations sociales, reçoit un chèque de 2106 Euros, soit un taux de prélèvement moyen de 44,5 % de son salaire super-brut. Il ne s’agit pas bien sûr uniquement de prélèvements sans contrepartie : il va pouvoir bénéficier à l’âge de départ en retraite d’une pension proportionnelle à ses cotisations retraite (nous y reviendrons un autre jour), d’une allocation chômage proportionnelle à ses revenus (nous avons déjà évoqué ici ce cas). Pour l’heure notre salarié gaulois doit encore payer l’impôt sur le revenu. Il ne déclare pas son revenu de 3794 Euros mais son revenu net de 2106 Euros. Si on utilise le barème de l’impôt 2007 sur les revenus de 2006 et que l’on suppose que notre gaulois est célibataire et sans enfant, il devra envoyer au fisc un chèque de 1924 Euros pour l’année, soit un prélèvement mensuel de 160 Euros. Son revenu net d’impôt est alors de 1946 Euros, soit un taux net de prélèvement obligatoire de 47,4% se décomposant de 44,5% de cotisations sociales et de 2,9% d’impôt sur le revenu (toujours en fonction de son salaire super-brut).

Les cotisations sociales, qui n’apparaissent pas sur la feuille d’impôt mais sur la feuille de paie sont les prélèvements les plus importants des prélèvements obligatoires français, mais ils sont à peine connus des salariés français. Rien d’étonnant à ce qu’ils aient eu tendance à augmenter massivement sans trop de peine pour financer la protection sociale. A l’inverse l’impôt sur le revenu, très visible, suscite des diatribes enflammées.

Maintenant que le fonctionnement du système est clarifié, il est possible de calculer quelle est la part des différents prélèvements payés par les salariés pour différents niveaux de salaire. Le graphique ci-dessous représente le pourcentage des prélèvements obligatoires (cotisations sociales, impôt sur le revenu, CSG-CRDS) en fonction du salaire super-brut. L’axe des abscisses est par contre le salaire brut mensuel afin de faciliter la lecture. Dans ce calcul les baisses ciblées des charges patronales ne sont pas incluses.


Les cotisations sociales sont un prélèvement régressif (dont le taux marginal est décroissant en fonction du salaire), les prélèvements sociaux CSG-CRDS sont des prélèvements proportionnels (dont les taux marginaux sont constants) et l’impôt sur le revenu est un prélèvement progressif (avec un taux marginal croissant avec le salaire). Le fait que les cotisations sociales soient prélevées de façon régressive ne signifie pas forcément qu’elles sont en soi régressives puisque la protection sociale n’est pas proportionnelle aux cotisations (sauf pour les retraites). Mais plutôt que discuter des mérites redistributifs de notre système de prélèvement fiscalo-social (fiscal et social), regardons plutôt les effets d’une telle structure.

III/ Un système incompréhensible aux effets pervers

La structure des prélèvements obligatoires en France est foncièrement incompréhensible aux citoyens français. Elle est complexe sans raison valable et a de nombreux effets pervers. J’en vois au moins trois :
1/ La distinction entre cotisations sociales et employeurs induit en erreur les salariés en leur faisant croire qu’ils ne paient pas le coût de leur protection sociale. Ils ne peuvent donc pas prendre des bonnes décisions sur le niveau de protection sociale qu’ils désirent vraiment puisque l’arbitrage entre le coût et les bénéfices n’est pas clairement établi. A ce titre la proposition d’Overzelus de supprimer cette distinction permet d’aligner l’incidence fiscale légale sur l’incidence fiscale réelle. Cela a un avantage pédagogique au cas où l’incidence fiscale n’était pas comprise par les salariés ou les syndicats.
2/ Ensuite le fait d’exprimer des taux de prélèvement en fonction de base qui varient (salaire brut, salaire net) accroît la complexité d’un système qui n’en a pas besoin. En supprimant la distinction cotisations salariés /employeurs, il devient possible d’exprimer tous les prélèvements en fonction du coût du travail et donc de clarifier la discussion sur le niveau de redistribution et sur le niveau des prélèvements obligatoires. Si souvent les salariés confondent le taux marginal supérieur d’impôt sur le revenu avec le taux moyen payé, ils ignorent largement combien de cotisations sociales (salarié/employeur) ils paient en réalité. Il n’est pas rare de voir des gouvernements promettre des baisses d’impôt (sur le revenu) pendant qu’ils laissent augmenter les prélèvements moins visibles (les cotisations sociales).
3/ La distinction cotisations salarié/employeur donne ainsi une incitation fiscale particulièrement peu bienvenue à l’augmentation des cotisations sociales : toute augmentation de salaire qui a lieu par l’augmentation des cotisations patronales est non imposée à l’impôt sur le revenu (par exemple augmenter les cotisations patronales retraite est une façon d’augmenter les salaires super-brut en échappant à l’impôt sur le revenu).

On peut juger que le système socialo-fiscal français est trop/pas assez redistributif, mais cela ne devrait pas empêcher de considérer qu’il est d’abord extrêmement illisible. Cette illisibilité pose à mon sens un problème démocratique. Si les électeurs (ou les salariés) ne peuvent pas facilement comprendre quels sont les montants d’impôt ou de contribution qu’ils font, alors il ne faut pas s’étonner que la démagogie nourrisse le débat politique. L’ exigence de transparence est une condition du bon déroulement du débat démocratique. L’article 14 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyens, rédigés par les descendants de nos gaulois, garde toute sa modernité : « Les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée. »

J’espère que tout le monde est encore avec moi… il est temps d’aller manger une petite fondue !
_Antoine_
_Antoine_

26 commentaires:

Anonyme a dit…

Oui, je suis encore là mais je ne vois pas arriver la fondue...... ;o)

Anonyme a dit…

C'est dommage, vous n'avez pas inclus la progressivité des cotisations patronales entre 1 SMIC et 1.6 SMIC ni la PPE ou la décote...
Tout ça pour dire que la complexité ne s'arrête malheureusement pas aux aspects que vous dénoncez à juste titre... C'est dire l'amplitude des changements qui pourraient être apportés pour rendre la fiscalité du travail enfin compréhensible par le citoyen.

Anonyme a dit…

Si souvent les salariés confondent le taux marginal supérieur d’impôt sur le revenu avec le taux moyen payé,...

Je ne risque pas de confondre : je ne comprends pas... Cela veut dire quoi ?


toute augmentation de salaire qui a lieu par l’augmentation des cotisations patronales est non imposée à l’impôt sur le revenu

Et alors ? C'est bien, c'est mal ? L'argent se perd quelque part ?


C'est encore trop peu clair.
Personnellement je ne m'intéresse pas au brut mais bien au net ! Et avec cet article je n'ai pas compris où se situe mon intérêt.

Anonyme a dit…

Je n'ai pas compris non plus le point 3). Je crois saisir que l'augmentation de la part des cotisation patronales dans le salaire superbrut correspond à une baisse de l'IR, mais en quoi s'agit-il d'une incitation peu bienvenue ?

-F

Anonyme a dit…

Donc si je suis votre raisonnement sur les charges patronales, une baisse de celles-ci est une baisse du salaire ?
J'ai toujours du mal à adhérer à cette lecture des charges patronales. Aucun des arguments que l'on m'a avancé pour essayer de m'expliquer cette analyse n'arrive à me convaincre.

Antoine a dit…

@Proteos: oui effectivement, il aurait été bien d'inclure les baisses ciblées des cotisations patronales et la PPE. D'ailleurs si on voulait avoir une vision complète de la redistribution effectve du système social et fiscal français, il faudrait prendre en compte toutes les allocations, pensions et dépenses publiques financées par les prélèvements (ainsi que les autres prélèvements et les autres types de revenus). Si Ecopublix survit assez longtemps, nous essayerons de parler de tout cela ;)

@Hildoceras: le taux marginal supérieur de l'impôt sur le revenu est de 40%. La plupart des Français retiennent ce taux comme symbole de la forte imposition en France et font l'amalgame avec le taux de prélèvement obligatoire de 44 %. Le taux moyen payé est le rapport entre l'impôt payé et le revenu total. Le message que ce post veut faire passer est qu'il faut considérer l'ensemble des prélèvements et non une partie d'entre eux pour avoir une vision globale des prélèvements oblgatoires.

@Hildoceras & anonyme: lorsque les salariés négocient avec leur employeur une augmentation de salaire super-brut (une augmentation de leur revenu total), ils peuvent choisir une augmentation du salaire brut (pour augmenter leur salaire net ou une augmentation des cotisations patronales retraite qui donnera droit à des pensions proportionnelles. 1 Euro d'augmentation du salaire super-brut se traduit par une augmentation du salaire net de moins de 1 Euro (cotisations salariées) mais du coup à un supplément d'impôt sur le revenu. Ce n'est pas le cas si les employeurs et les salariés se mettent d'accord à augmenter les cotisations patronales pour augmenter les pensions de retraite. En bref, lorsque je parle de mauvaises incitations, je pense au fait que les choix de protections sociales sont influencés par la structure des prélèvements.

@Hildoceras: le fait que vous vous occupiez du net est tout à fait logique (c'est d'ailleurs le raisonnement des économistes), mais en même temps vous devez penser aux cotisations retraites qu vous donnent droit à des pensions proportionnelles, non?
Par ailleurs, en tant que citoyen, vous devez participer aux décisions politiques qui décident comment le revenu total de votre travail (votre coût pour votre employeur) se traduit en terme de salaire net, de revenus différés (retraite), d'assurance (allocations chômage) et de financement des biens publics dont vous profitez. Quel que soit votre point de vue sur le système actuel, il me semble important que vous ayez conscience quelle est la part que vous consacrez à ce financement.

@Eric E: Une baisse des cotisations patronales n'est pas une baisse du salaire. Ce n'est absolument pas ce que l'on essaye d'expliquer. Ce que l'on dit c'est que les cotisations patronales sont payées par les salariés. Le revenu total du travail des salariés ne dépend pas du niveau des cotisations sociales et patronales. Si on baisse (augmente) les cotisations patronales, alors les salaires nets vont augmenter (baisser).
Tout ceci n'est valable qu'au-dessus du Smic. Au niveau du salaire minimum, c'est plus compliqué, mais on y reviendra.

@tous: n'hésitez pas à poser vos questions si un point ne vous paraît pas clair. C'est vraiment important!

Anonyme a dit…

@petitsuix

on a donc des statistiques qui montrent que les diverses baisses de charges patronales ces dernières années ont amené une hausse des salaires nets ?

Anonyme a dit…

@ petitsuix

de la part de "béotien",

Merci à nouveau pour ces explications concernant le maquis des charges sociales.

Baisse des charges patronales >> augmentation des salaires nets ?

A condition toutefois que l'employeur ne décide pas d'allouer le gain ailleurs non ?

Antoine a dit…

@Eric E: Je répète la dernière phrase du dernier commentaire: "tout ceci ne vaut qu'au-dessus du niveau du Smic". Une hausse (baisse) des cotisations patronales au niveau du Smic n'augmente pas le salaire net, augmente (baisse) le salaire super-brut (le coût du travail). Selon la sensibilité de la demande de travail (l'offre d'emplois des entreprises) à son coût cela conduit à baisse (hausse) du nombre d'emplois.

La question de savoir si la demande de travail est sensible à son coût est au coeur des débat sur les baisses de charges patronales au niveau du Smic. Nous y reviendrons dans des posts consacrés à cette question.

Pour faire vite et répondre partiellement à votre question, avec un salaire minimum et avec une baisse des charges sociales au niveau du salaire minimum, il est vraisemblable que le salaire net au niveau du smic n'augmente pas du même montant. Si c'était le cas, cela voudrait dire à la fois que le smic ne contraint pas les employeurs et que les baisses de cotisations sont inutiles. Si les baisses de cotisations ont l'effet attendu (accroître le nombre d'emploi) alors les salaires nets ne devraient pas augmenter d'autant.

Sur le cas français on verra que les baisses des cotisations patronales au niveau du Smic ont souvent permis d'augmenter le smic brut (donc le salaire net) en neutralisant les effets sur le coût du travail au niveau du salaire minimum. Mais on reparlera de tout cela chiffres à l'appui, car c'est une question très importante et fortement débattue en France.

Anonyme a dit…

@petitsuix

c'est bien parce que c'est une question très importante et fortement débattue en France que je pose la question :)

Je reste malgré tout sur ma position, je ne vois toujours pas en quoi les charges patronales sont payées par les salariés.
Elles sont un coût pour l'entreprise, mais je ne vois pas comment vous pouvez dire qu'elles sont payées par les salariés. Lorsqu'elles varient, le salaire net ne bouge pas ( contrairement a ce qui se passe lors des variations sur les charges payées par les salariés ).
Si il y avait un vrai mouvement des salaires proportionnel aux variations des charges patronales, je pourrais revoir ma position, mais à chaque fois que j'ai soulevé la question on me parle du SMIC ( qui est administré par l'état et
dont les variations n'ont donc pas grand chose à voir avec les variations des charges, en tout cas pas directement ) et jamais de l'effet sur les autres salaires.

Antoine a dit…

@Eric C: Je vous renvoie au post d'Overzelus sur "qui paie les cotisations sociales" .
A tres cout terme, une augmentation des charges patronales est payee par les employeurs : si j'augmente aujourd'hui les cotisations employeurs, le salaire net ne bouge pas. OK. Mais ensuite, par le biais de non augmentation du salaire net, par l'effet de l'inflation, le salaire net baisse du montant de cette augmentation.
C'est pourquoi la part dans le PIB du travail (salaires nets + cotisations) n'a pas bougé depuis 50 ans malgré une augmentation fulgurante des cotisations patronales! (voir le graphique dans le post d'Overzelus)

Les charges patronales ne sont pas plus un cout pour l'entreprise que le salaire net et les cotisations salariales! Pour l'entreprise, ce qui importe c'est le total, mais la facon dont ce cout total est reparti entre consommation immediate, assurance et financement des retraites.

Anonyme a dit…

@Petitsuix
Vous dites "C'est pourquoi la part dans le PIB du travail (salaires nets + cotisations) n'a pas bougé depuis 50 ans"
J'ai lu récemment une étude qui disait que la part des salaires (salaires et cotisations) dans le PIB aurait chuté d’environ 12% de 1982 à 2004.
Pourriez-vous clarifier ?

Julien a dit…

@ Emir Abel : concernant l'évolution de la part des salaires dans la valeur ajoutée, je ne peux que vous renvoyer à cet excellent post d'Andrea Bonappeti du blog Optimum.

Anonyme a dit…

Si j'ai bien compris votre réponse sur le point 3), les salariés et les patrons se mettraient d'accord sur une augmentation des salaires via le poste des charges patronales (payé par les salariés comme vous l'expliquez) ?
Ma question est peut-être naïve, mais les salariés ne préfèrent-ils pas une augmentation du salaire net ? En pratique, ce type de négociations sur les charges patronales arrive-t-il fréquemment ?

F

Antoine a dit…

@Anonyme: Ce que je veux dire c'est que les salariés et les employeurs discutent a la fois des salaires et des cotisations (pour les retraites, le chomage). Cela arrive en pratique a chaque fois qu'il y a negociation entre les syndicats et le patronat sur la gestion paritaire des regimes de retraite ou d'assurance chomage. Meme si les salariés preferent du salaire net, le fait que seul le salaire soit imposé a l'IR engendre une incitation a preferer des cotisations patronales retraite (a du salaire net). Par exemple si les syndicats parviennent a negocier 1 Euro supplementaire aux employeurs (1 Euro de cout du travail en plus), soit cela donne 1 Euro de cotisations patronales en plus qui sera recuperé en retraites, soit (1-taux d'imposition) de salaire net.

Anonyme a dit…

Ce sont donc les syndicats qui négocient sur les charges patronales. Je crois avoir compris, merci.

F

Anonyme a dit…

Pour moi cela reste peu clair.

C'est surtout que cela part de bases qui me sont étrangères.
Vous parlez d'augmentations du salaire, mais dans l'entreprise que j'ai quitté, cela n'existe pas, à part primes d'ancienneté. C'est pourquoi la plupart des gens quittent cette entreprise, d'ailleurs, comme moi :D
Donc sans augmentations de salaires possibles la part patronale nous est (était) indifférente.

Par ailleurs vous évoquez mon intérêt supposé pour les cotisations retraites. Or cet intérêt est nul : je n'ai aucune chance de toucher une retraite complète sauf à vouloir travailler jusqu'à 75 ans ou plus, ce qui dépassera vraisemblablement mon espérance de vie.
C'est pourquoi mon intérêt est pour du net et si possible tout de suite ;)

Quand à la part que l'État prélève sur mon salaire brut, il m'est totalement indifférent. Cela concerne mon patron et pas moi. Quand au bout d'un an, mon salaire net a baissé de trois euros, le patron a incriminé l'État, moi je n'ai rien dit. Quand au bout de deux ans, le salaire n'a pas bougé, moi j'ai dit "au revoir" et je vais voir ailleurs.
Le discours des charges sociales qui étranglent l'entreprise est incohérent avec le 4x4 neuf et les vacances au Mexique.

Cet article parle vraiment de choses qui me sont très étrangères.

Antoine a dit…

@Hildoceras: J'essaie de vous comprendre et de vous répondre.

- "sans augmentations de salaires possibles la part patronale nous est (était) indifférente": la part patronale ne vous est pas indifférente car celle-ci influe sur la possibilité ou non d'une augmentation de salaire net. L'entreprise que vous avez quittée est une entreprise parmi des milliers: vous avez changé pour une autre entreprise qui vous payait un salaire plus élevé, mais cette autre entreprise paie aussi des cotisations patronales. Si celles-ci baissent, elle pourrait s'attacher vos services en vous donnant plus de net (pour le même coût). L'entreprise est indifférente entre vous donner 100 net et 100 de cotisations retraite ou vous donnez 200.

- "Quand à la part que l'État prélève sur mon salaire brut, il m'est totalement indifférent": d'un côté vous avez raison de dire que seul le salaire net vous importe, en même temps le montant du salaire net dépend du montant que l'Etat prélève sur votre salaire brut. Par ailleurs,
c'est vous qui élisez des types pour décider combien de votre salaire super-brut est prélevé pour vous donnez combien de retraite, d'allocations familiales, d'assurance chômage etc... Normalement, cela vous concerne un peu.

- "je n'ai aucune chance de toucher une retraite complète sauf à vouloir travailler jusqu'à 75 ans ou plus, ce qui dépassera vraisemblablement mon espérance de vie." : je pense que cette phrase est fausse plusieurs fois; d'abord parce même si vous ne touchez pas de retraite complète, celle-ci va être proportionnelle aux cotisations que vous aurez versées; ensuite parce que votre espérance de vie dépasse actuellement 75 ans, ensuite parce que dans aucun scénario vous toucherez une retraite incomplète en travaillant jusqu'à 75 ans. Je vous renvoie là-dessus au post que je viens de publier (Retraites 1/40).

"Le discours des charges sociales qui étranglent l'entreprise est incohérent avec le 4x4 neuf et les vacances au Mexique.": là je ne comprends pas ce que vous voulez dire; tout le post essaie d'expliquer que les cotisations sociales n'étranglent pas les entreprises car elles sont payées in fine par les salariés par des salaires plus faibles et vous me dîtes que nous tenons ce genre de discours?

Anonyme a dit…

@hildoceras

En fait cela devient évident si vous vous mettez à la place de votre employeur.

Lui, il a un budget pour vous payer, imaginons par exemple 5000 euros. Les choses sont donc simples : il ne peut pas dépasser ce budget.

Pour lui, vous coûtez votre salaire superbrut (donc salaire net + cotisations salariées + cotisations patronale < 5000 euros).
Vous votre objectif va donc être de vous rapprocher le plus possible de ces 5000euros globaux (en réalité vous négociez bien sur votre salaire brut en pensant au Net, mais votre employeur négocie en brut en ne pensant qu'au super brut... comme cela complique les choses !).

Vous comprenez bien que pour lui, peut importe quelle part du salaire superbrut va aller dans votre poche en Net et quelle part va aller dans les cotisations salariales/patronales ! Il ne peut se permettre que 5000 euros et pas un sou de plus pour que vous soyez son employé.

Vous voyez donc que - à budget employeur constant de 5000 euros - plus les cotisations salariales et patronales seront importantes, moins votre salaire pourra être élevé !

Et le fait est que - voir démonstrations sur autres posts sur l'incidence fiscale -, au fur et à mesure que les cotisations salariales/patronales ont augmenté depuis 50ans en France, les employeurs ont petit à petit diminué le salaire NET, pour concerver leurs dépenses (salaire superbrut, le seul qui compte pour eux) au niveau qu'ils souhaitaient !

On peut donc dire qu'en France, historiquement, le fait d'avoir augmenté les cotisations sociales patronales et salariales est l'une des principales causes de la chute de notre pouvoir d'achat c'est à dire de notre salaire Net.
(messieurs en "ix" ou en "us" dites moi si j'ai bon là, je m'avance peut-être un peu il y a peut-être d'autres causes...)
:D

Votre salaire NET est donc tout à fait impacté par les cotisations patronales et salariales !

Le raisonnement est exactement le même si vous employez une femme de ménage. Vous avez un budget global par exemple de 500 euros que vous ne voulez pas dépasser.
Que l'Etat en prenne en taxes 50, 80 ou 100 peut vous importe ! Par contre, le revenu de la femme de ménage va être fortement impacté par ces taxes !

Cordialement

Anonyme a dit…

J'ai compris comme Jaggy, même si je crois que ce n'est pas nécessairement au salarié de faire avec le budget du patron: le poids des cotisations se répartit selon l'élasticité de l'offre et de la demande. En gros, si une différence de 100euros est relativement indifférente aux patrons mais importe beaucoup aux salariés, la charge de cette somme sera prise en partie par le patron. Pareil si l'employé de maison tient beaucoup à toucher une certaine somme nette (d'un montant raisonnable): vous prendrez probablement une partie des cotisations à votre charge, puisqu'elle vous importe moins.

Est-ce bien cela, messieurs les Gaulois ?

-F

Antoine a dit…

@Jaggy et F: Vous avez bien compris, même si F a raison de souligner que théoriquement les employeurs peuvent payer une partie des cotisations (patronales ou salariales) si les employés sont plus sensibles au salaire net que les employeurs ne le sont au coût du travail. En pratique, et d'après les études dont on dispose, ce sont presque toujours les salariés qui paient les cotisations simplement car les employeurs sont souvent soumis à de la concurrence pour vendre leurs produits et que les salariés ne peuvent généralement pas se passer de travailler et de gagner un revenu.

Sur le pouvoir d'achat, Jaggy, vous avez presque raison. Oui, la hausse des cotisations explique en large partie pourquoi l'essentiel des gains de productivité n'a pas été consacré à l'augmentation du salaire net, mais au financement de revenus différés comme les retraites. "Presque" raison, car on ne peut pas dire qu'historiquement le pouvoir d'achat ait baissé en France. Il a fortement augmenté pendant les trente annnées qui ont suivi la fin de la seconde guerre mondiale et il a augmenté très légèrement depuis la fin des années 70. Avec la réduction très forte de l'inflation depuis le milieu des années 90, la faible croissance du salaire net apparaît aux yeux de nos concitoyens: quand l'inflation court à 5-6%, personne ne s'aperçoit qu'une augmentation des salaires de 5-6% est une stagnation!

Anonyme a dit…

Je voudrais faire une remarque sur la courbe sur laquelle on voit le taux de prélèvement en fonction du salaire superbrut.

Ce que l'on peut en dire, c'est que cela tord le cou au discours habituel, qui prétend que la moitié des français ne payent pas d'impots.
En réalité, tout le monde paye au moins 45% de ses revenus en impots.

Cela suscite la question des rendements de ces cotisations sociales/patronales.
- C'est à dire d'une part, quelle part de ces cotisations est effectivement reversée aux ayant droits (retraités, malades, chomeurs...) ? Est-ce que ce système est efficient ? (je pense par exemple à l'analyse que l'on fait des associations qui militent pour la lutte contre le cancer, pour lesquelles ce rendement est égal aux sommes reversées à la recherche divisées par les sommes totales récoltées)
- Et d'autre part, quel est le rendement équivalent du système des retraites ? (si je mettais de l'argent en banque, quel taux me permettrait d'avoir la même retraite que celle que me propose l'Etat ?)

Ensuite, on voit que la CSG-CRDS est certainement une source de revenu supérieure à l'IRPP. A quoi sert cet impot ?

Enfin, ma dernière question : si on veut augmenter le pouvoir d'achat des français, il est tentant de dire qu'il faudrait réduire le train de vie de l'Etat pour diminuer ces cotisations sociales.
Mais à votre avis, comment pourrait-on revenir en arrière, c'est-à-dire diminuer ces cotisations sociales, tout en s'assurant que ces sommes seront bien reversées aux employés et non conservées par les entreprises ? Ou peut-être que sur le long terme cela reviendrait au même ?

Cordialement

Antoine a dit…

@jaggy: plusieurs remarques sur votre commentaire:
1/ Le graphique des taux est incomplet car il n'inclut pas les baisses des cotisations sociales au niveau du Smic qui donnerait une vision plus progressive. Un post est en preparation sur le sujet.
2/ Le rendement des retraites est mon prochain post.
3/ La CSG-CRDS sert a bcp de choses mais en particulier a payer les depenses de santé.
4/ Les cotisations sociales servent a payer des benefices que recoivent les Francais et non "le train de vie de l'Etat". Si vous voulez baisser les cotisations retraite, il faut baisser les retraites. Si vous voulez baisser la CSG, il faut privatiser la securite sociale. Si vous voulez reduire les autres impots, il faut baisser les autres depenses publiques.
"Reduire le train de vie de l'Etat" est une expression fallacieuse car elle semble indiquer que les depenses publiques (education, santé, retraites, allocations) ne sont pas recues par les citoyens mais par ceux qui nous dirigent.

Anonyme a dit…

Mes compliments pour vos explications. Quelques compléments quand même :

- Le salaire super-brut, autrement dit le coût du travail, c’est aussi le montant du travail du salarié payé, avec encore d’autres choses, par le client de l’employeur qui lui verse ses euros. C’est le montant du pouvoir d’achat créée par le travailleur, et dépensé par le client de l’employeur. Tout ce qui est prélevé sur ce montant, c’est une confiscation d’une partie du produit du travail du travailleur. Comme il lui en reste un peu avec quoi il doit se débrouiller pour vivre, il n’est pas considéré comme étant un esclave.

- Cela ne vous inspire pas, ce taux officiel de prélèvements obligatoires de 44% pour 2005 que vous invoquez comparé au taux de 47,4% (en réalité, 48,7%) de prélèvements obligatoires sur le super-brut que vous avez calculé ? Vous n’ignorez certainement pas que le produit économique intérieur, le montant des « richesses » créées en une année, est normalement constitué par ces super-bruts des salariés et les rémunérations des travailleurs indépendants, y compris les sociétés commerciales. Le super-brut, c’est donc la petite partie du produit intérieur élaborée par le salarié dont vous avez décortiqué le bulletin de paie.

- La litanie des prélèvements subis par ce salarié est incomplète. Manquent : les impôts locaux (taxe d’habitation et impôts foncier), et surtout les impôts travestis dans le prix des produits achetés (pour 2006, environ 18% du prix en moyenne). Il en est d’autres, occasionnels et innombrables.

- au total, tout bien calculé, les prélèvements sur le produit du travail s’élèvent, en moyenne générale, à environ 65% du super- brut, soit deux jours de travail sur trois. On peut se demander si l’esclave, nourri, logé, habillé, etc. était plus mal loti. Mais chut, ne dites pas cela aux syndicats ni aux économistes, ils ne s’en sont pas aperçus.

Antoine a dit…

@Roland: Merci pour vos compliments, mais vos "compléments" me laissent à penser que notre travail pédagogique est loin d'être fini.

D'abord le revenu super-brut des salariés ne constitue pas la "petite partie" du PIB, mais les deux-tiers de celui-ci. Les revenus des indépendants représentent une petite partie et le reste (un tiers) est constitué des revenus du capital (bénéfices, intérêts...).

Ensuite si vous avez raison de souligner que les prelèvements obligatoires ne se limitent pas à l'impôt sur le revenu, la CSG et les cotisations sociales, les autres prélèvements (TVA et taxes locales) ne sont pas des prélèvements sur le travail.

Enfin (et surtout) votre comparaison avec l'esclavage est soit de mauvais goût soit le produit d'une singulière ignorance. Je passe sur la description des conditions de vie des esclaves africains, sur celles des esclaves de l'Antiquité, dont l'ignorance peut être mise sur le compte de l'ignorance commune des travaux historiques.

Par contre, ce que vous devriez moins ignorer c'est que ces prélèvements obligatoires sont le résultat de choix démocratiques d'individus libres (même si vous ne semblez pas la valoriser beaucoup, la liberté a une valeur en soi) et surtout ont pour conséquence une éducation gratuite, des soins gratuits, une retraite proportionnelle au revenu de plus de 23 ans, ainsi qu'une litanie de subventions et d'allocations que les Français les plus prompts à dénoncer le poids des impôts sont aussi les premiers à profiter. A aucun moment il ne s'agit de "confiscation", "d'esclavage" encore moins.

Roland Verhille a dit…

@ Petitsuix.
Oh là là, je comprends que j’ai heurté vos convictions ou vos connaissances, et j’en suis désolé. Vous me faîtes une leçon, alors je vous réplique, sans en faire une dispute, loin de là.
Un texte de commentaire voulu court, mais frappant les esprits, prend ce risque. Mais je pensais qu’avec des auteurs se présentant comme hommes de science, qui plus est publiant leurs textes sur un mode humoristique, il n’y avait pas de risque. Je me suis trompé. Alors, je dois être un peu plus long, très long même, tout en restant aussi vif, sans qu’il s’agisse de méchanceté ou de manque de considération pour autrui.
Car je ne me suis pas trompé sur le fond de mon commentaire, et, s’il vous plait, acceptez que je vous dise là où vous vous trompez et pourquoi (vous êtes des scientifiques, non ?).
Oui, votre travail pédagogique est loin d’être fini. Il vous faut d’abord sérieusement compléter votre formation, et ce ne sera pas facile, car il faudra compter sur vous-mêmes. Vos maîtres sont loin de vous avoir appris le nécessaire, ils ont dû je pense surtout vous apprendre à apprendre. Vous ne la compléterez pas en vous bornant à accumuler un savoir sans borne sur ce que les autres ont écrit ou sur les travaux publiés par les autres, même par l’INSEE ou l’OCDE. Il vous faudra apprendre à repérer vous-mêmes les faits pertinents à analyser en vue d’essayer de comprendre par vous-mêmes le fonctionnement de l’économie, il vous faudra apprendre vous-mêmes à saisir le fonctionnement de l’être humain, il vous faudra apprendre vous-mêmes à utiliser cette merveille des comptabilités nationales sans vous laisser induire en erreur par certains procédés de traitement des données de base, procédés qui, bien que conformes à une norme internationale, sont irréfutablement erronés. Et sans doute encore beaucoup d’autres choses. C’est passionnant d’être en train d’apprendre tout cela, je vous envie.
Sur le super-brut « petite partie » du PIB, vous m’avez très mal lu. D’abord, je n’ai pas écrit PIB, mais produit intérieur (je désigne ainsi le montant de cette production en corrigeant dans le calcul du PIB trois erreurs irréfutables de double emploi). Ensuite, j’ai traité du super-brut individuel d’un salarié déterminé, celui pour lequel vous avez opéré vos calculs. Et vous n’avez pas saisi que, peut-être trop concisément ou en rédigeant mal, j’ai expliqué que ce super-brut est la contribution de ce salarié à la constitution du produit intérieur.
Sur la rémunération des salariés s’activant à produire les biens et services de l’économie nationale, vous m’opposez qu’elle est « égale aux deux tiers du PIB. Et le reste, etc. ». Voyez quelle est la décomposition de ce PIB pour 2006 (pas publié par l’INSEE ni par un quelconque économiste, calculé moi-même) :
PIB 2006 milliards d’euros, 1792 se décomposant ainsi : Impôts sur production moins subventions, 244 ; Consommation de capital fixe (= Amortissement des biens de production), 237 ; Rémunération des salariés (somme des « super-bruts »), 931 ; Rémunérations des travailleurs indépendants et des ménages auto-producteurs, 227 ; Rémunération des sociétés, 153. Sur les doubles emplois, remarquez, seulement ici au passage, que dans les 931 de rémunérations de salariés, il y en a 235 pour les agents de l’État, payés avec des euros prélevés entre autres sur la paie des autres qui font eux 696. Ce n’est pas compter deux fois la même chose dans le calcul des revenus globaux?
Vous n’avez pas compris comment est constitué le PIB en me répliquant qu’en sus des salaires, des rémunérations de travailleurs indépendants, et des bénéfices (il ne s’agit pas de bénéfices, mais d’excédent d’exploitation, ce qui n’est pas la même chose !), il y a des intérêts (ils sont une redistribution du revenu primaire décomposé ci dessus).
Pour les prélèvements que vous n’avez pas pris en compte, je ne vous reproche rien, le titre de votre texte n’était pas ambigu. J’ai seulement trouvé bon de compléter votre information pour traiter complètement cette analyse bien venue du super-brut. Mais ne me faites pas une querelle de mots en me répliquant qu’il ne s’agit pas de prélèvements sur le travail. Car alors, ce sont des prélèvements sur quoi ? Il n’y a que sur le produit du travail que l’État peut prélever quelque chose, et c’est fait soit directement (la TVA payée par le travailleur, c’est bien un prélèvement sur son travail, non ?) ou indirectement (prélèvement sur les autres revenus, y compris les revenus de transfert).
Pour la comparaison avec l’esclavage, mauvais goût peut-être, mais iconoclaste serait plus approprié. Et vous m’avez aussi mal lu, je n’ai pas écrit que le travailleur est aujourd’hui comparable à un esclave. J’ai écrit « on peut se demander si etc. », tellement est importante la part du produit de son travail qui est prélevée autoritairement par l’État. Vous me répliquez que se le demander c’est une manifestation d’ignorance, ce qui n’est pas gentil, mais ce que je ne reçois pas du tout comme étant une insulte. Ce n’est pas être ignorant que de ne pas voir de différence entre : ne pas payer le produit de votre travail car vous n’êtes qu’une chose, celle du maître qui vous possède ; et vous le payer sur le papier en en reprenant d’autorité la plus grande partie (les deux tiers, deux jours sur trois, mais cela n’a pas fait « tilt » chez vous) pour alimenter les caisse de l’État, notre maître à tous.
Sur la liberté, vous vous méprenez, c’est mon sens excessif de la liberté individuelle que vous devriez me reprocher, eu égard à votre discours sur les prélèvements obligatoires.
Sur les prélèvements obligatoires qui seraient le résultat d’un choix démocratique d’individus libres, là les bras m’en tombent. Organisez donc un référendum pour demander au Français s’ils votent pour un taux de prélèvements obligatoires d’environ 65% sur leurs revenus, vous verrez le résultat ! Et la terminologie classique d’ «impôt confiscatoire », vous ne la connaissez pas ?
L’éducation serait gratuite? Les soins seraient gratuits ? Les retraites seraient proportionnelles aux revenus (revenus de qui ? et les retraites de qui, de ceux qui ont cotisé et payé leur retraite, de ceux qui n’ont pas cotisé ?) ? Une litanie de subventions et d’allocations seraient aussi gratuite ? Mais vous croyez que l’argent nécessaire pour tout cela tombe du ciel ?
Bon, assez. Je vous invite tous ici chez moi, en Morinie, (TGV Paris Nord Calais-Frethun, 1:30, retour dt°). On pourra se faire une journée d’étude sur les comptes de la Nation. Et j’aurais aussi à vous montrer quelques reproductions de documents historiques et préhistoriques authentiques qui pourraient vous étonner).
Cordialement.

Enregistrer un commentaire